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LE ROMAN


EN 1853.




Je voudrais parler de l’état présent du roman, mais il faut faire un choix, et le choix n’est pas facile. Apprécier tous les romans publiés cette année ! chose impossible, et qui n’intéresserait personne. Les pensées que j’aurais à exprimer s’effaceraient devant la multitude des détails que j’aurais à indiquer. Pour enchaîner l’attention du lecteur, je suis forcé de circonscrire le champ de mon examen. Il se présente un point de départ tout naturel qui me permet d’embrasser d’un regard les dernières œuvres qui offrent quelque importance.

Les promesses du roman n’ont pas été moins pompeuses que les promesses de l’école dramatique. Ces promesses, je me plais à le reconnaître, ont été suivies de gages nombreux, de gages éclatans : Prosper Mérimée, Alfred de Vigny, George Sand, ont inauguré dignement l’ère nouvelle. Aujourd’hui, nous sommes bien loin de ces promesses. La vérité historique, la vérité humaine que nous attendions, dont les premières lueurs nous avaient réjouis, sont à peu près oubliées. C’est à peine si les ouvriers qui ont remplacé les artistes comprennent ce magnifique programme. Si quelqu’un se hasarde à le rappeler, on le compare volontiers à l’apôtre prêchant dans le désert. Il faut pourtant, pour estimer les œuvres nouvelles, prendre comme pierre de touche les promesses dont je viens de parler, car c’est la seule manière d’exprimer une opinion précise et de ne pas demeurer dans les nuages.

Essaierai-je d’analyser les interminables récits qui aident les désœuvrés à tuer le temps ? Tâche ingrate ! Les auteurs, formés en