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BEAUX-ARTS




LES PEINTURES DE SAINT-VINCENT-DE-PAUL ET DE L'HOTEL-DE-VILLE.





Nous vivons dans un temps étrange, au milieu d’inexplicables contrastes. Le mal et le bien sont partout ; il n’est pas un instant du jour où nous n’ayons juste sujet de perdre ou de prendre courage, d’espérer ou de désespérer. Pour ne parler que de la peinture, n’est-elle pas tout à la fois en déclin et en progrès ? Au Salon, cette bourse de nos peintres, la décadence est visible. On peut dire qu’à chaque exposition nouvelle l’art s’abaisse d’un degré. C’est le métier qui triomphe ; l’esprit, l’adresse, le talent même, se prostituent à qui mieux mieux aux exigences de la mode et aux caprices de l’argent. Si quelques pieux adorateurs de l’étude et de la vérité persistent à protester, le vide est devant leurs œuvres. L’enthousiasme, les couronnes vont de droit au procédé, à la manière, au faire de convention, à de plates réalités, mesquinement traduites tantôt par un imperceptible pinceau, tantôt par une brosse gigantesque. Qu’espérer d’un tel art, ou plutôt d’une telle industrie ? Eh bien ! à quelques pas de là, sur les murs de quelques églises et de quelques monumens, cet art, ce même art apparaît dans sa dignité. On dirait que, loin du bruit, loin du trafic, plus à l’aise et plus libre, il recouvre une vie nouvelle. Des défauts, vous en trouvez assurément sur ces murailles, tout comme ailleurs ; mais vous y trouvez les vertus du peintre, l’amour du beau et le culte du vrai, le respect de soi-même, le mépris des succès faciles. C’est un monde tout nouveau ; on se