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M. de Capellen n’ajoutent aux documens recueillis par l’histoire que le témoignage d’un homme impartial et grave.

Mais détournons les yeux de ces scènes douloureuses et revenons aux évènemens qui s’étaient passés en Hollande, à l’établissement du nouveau royaume des Pays-Bas et au prince qui en avait reçu la souveraineté.

M. Van der Duyn trace le tableau des opinions qui en 1814 se partageaient la Hollande. Il les divise en quatre catégories et les peint sous des traits que nous lui emprunterons pour éviter le reproche d’allusions. Il y avait donc alors, selon lui, en Hollande : « 1o les anciens soi-disant orangistes (soi-disant, parce qu’après avoir participé à tous les gouvernemens qui s’étaient succédé, ils croyaient néanmoins, en 1813, reprendre les mêmes droits qu’ils avaient eus en 1785), anciens aristocrates, mécontens du roi pour n’avoir pas rétabli l’ancienne république, ou du moins mis leur personne au premier rang et dans les premiers emplois ; 2o les véritables orangistes, fidèles à leurs anciens sermens et à un véritable attachement pour la maison d’Orange, rentrés dans les emplois et dans les affaires seulement après la révolution de 1813 (le nombre en était très petit) : quelques-uns étaient de bonne foi devenus libéraux ; 3o les renégats de la cause de la liberté, anciens révolutionnaires tâchant de faire oublier leurs antécédens par un zèle ardent pour le pouvoir, avides de grands emplois, d’une servilité dégoûtante et entraînant, le prince dans des essais imprudens ; c’étaient ceux que sa majesté préférait : champignons qu’on écrase, instrumens dociles que l’on brise et rejette loin de soi à volonté ; 4o les libéraux véritables, hommes du XIXe siècle, marchant à la tête de la civilisation moderne, guidant et devant finir par faire triompher l’opinion publique, après avoir puissamment contribué à la former. » L’esprit public et tous les hommes de mérite étaient pour les libéraux. « Depuis longues années déjà, écrivait M. Van der Duyn en 1831, et même dans notre pays de taupes, car nous le sommes bien plus que grenouilles, les gens de quelque esprit et de quelques connaissances étaient du côté de ce que l’on pouvait appeler, il y a cinquante ans, l’opposition ; par exemple, dans les petits troubles, tout au plus essais de révolution qui agitèrent la république de 1781 à I787, les connaissances et l’habileté, à très peu d’exceptions près, se trouvaient dans le parti dit patriote. Je me rappelle à ce sujet que mon père me contait que, la course trouvant au château de Loo, en 1786, tout ce qui tenait au parti stathoudérien y abondait journellement. Mme de Dankelmann, grande gouvernante de Mme la princesse d’Orange et femme d’esprit, disait souvent à mon père lorsqu’elle rencontrait quelque individu fort nul et fort bête : « Ah ! mon cher baron, il est sûrement des nôtres ! » Le roi Guillaume