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À la première apparence, sans examen approfondi, il retirait sa confiance à ceux qui en avaient joui pleinement. Il convenait de sa faiblesse, et m’a dit plus d’une fois que cette disposition était le fâcheux résultat de son expérience, faite surtout en France depuis sa jeunesse, ayant été si souvent trompé par ceux qu’il avait jugés les plus dignes de sa confiance. »

Le roi Louis, d’après M. de Capellen, s’est mépris lorsqu’il affirme dans ses documens que ses ministres, en 1810, lui ont conseillé de ne pas défendre le pays contre l’invasion de son frère. M. de Capellen proteste avec vivacité contre cette assertion. Il assure que la majorité des ministres, parmi lesquels il se trouvait avec Crayenhoff et Appelius, conseilla énergiquement au roi de défendre avec vigueur contre l’armée française, le passage des rivières et les forteresses, et par conséquent la Hollande. Le roi leur donna d’abord de Paris des ordres en ce sens ; mais un peu plus tard, intimidé sans doute par les menaces de Napoléon, il envoya contre-ordre, et commanda aux ministres de livrer les forteresses et de ne pas s’opposer au passage des rivières. « Moi entre autres, dit M. de Capellen, j’en fus désolé ; je l’écrivis sans détour au roi Louis. Mais plus tard, et lorsque les provinces étaient envahies par l’armée française, Louis voulut défendre à outrance la ville d’Amsterdam et faire opérer les inondations. Il demanda encore l’avis de ses ministres, et alors nous fûmes tous d’accord que cette défense, qui pouvait durer quelques jours, serait la plus grande folie et avec cela la plus grande inconséquence, après avoir ouvert gratuitement accès à ces mêmes troupes françaises, qui, par suite de cette mesure-là, occupaient le pays et entouraient la ville d’Amsterdam ; que les conséquences seraient terribles pour cette ville et pour toute la Hollande, qui, sans le moindre doute, allait être pillée, saccagée et ruinée de fond en comble, et que nous étions trop bons Hollandais pour vouloir faire ce sacrifice à une gloriole militaire. »

Ce fut à M. de Capellen le premier que le roi Louis fit confidence de son projet d’abdication en lui montrant la communication écrite de sa main qu’il le chargeait, en qualité de ministre de l’intérieur, de porter et de lire au corps législatif. « Il montra, dit M. de Capellen, beaucoup de fermeté et de caractère à cette occasion. » Le même jour eut lieu le départ du roi. Le conseil de régence qu’il avait institué, composé des ministres, envoya le général Janssens à Paris pour communiquer à l’empereur l’abdication de son frère et l’avènement du fils mineur du roi, sous la régence de sa mère, en ce moment à Plombières, et à qui le même message était adressé. La réponse ne se fit pas longtemps attendre. Le général Janssens trouva l’empereur à Rambouillet, où, après avoir exhalé sa fureur, Napoléon