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secrètes tramées et dirigées contre la vie du chef de l’état. Récemment encore à la suite d’une soirée passée par l’empereur dans un théâtre, un bruit de ce genre a circulé, si ces bruits étaient mal fondés, ce serait la chose la plus heureuse ; s’ils avaient quelque fondement, il ne serait certainement point nécessaire de se placer à un point de vue politique pour juger comme elles le méritent de semblables tentatives. Lors même qu’il n’y aurait pas contre de tels crimes un sentiment de répulsion qui a sa source dans une sphère bien supérieure à la politique, tous les partis honorables seraient intéressés les premiers à les considérer sous le même jour, car quel est parmi eux celui qui n’a point vu depuis trente ans la même perversité sanguinaire s’exercer contre des princes en qui il personnifiait ses idées et ses affections ? Le malheur est que ces actes odieux se sont décorés souvent d’une couleur politique et qu’on s’est plu quelquefois à leur laisser ce caractère, tandis qu’ils ne sont en réalité que le fruit des plus violentes passions échauffées et excitées dans le secret des bouges révolutionnaires. Au milieu de leurs épreuves et de leurs fortunes diverses, dans un temps comme le nôtre, les partis sérieux et honnêtes ont du moins fait ce progrès, qu’ils n’ont même aucune peine à répudiée de pareils auxiliaires. Celui qui arriverait au pouvoir par cette voie plierait sous le poids d’une invincible fatalité d’origine. Quant au fanatisme révolutionnaire, qui agit ici comme toujours pour son propre compte, il ne raisonne guère ; indépendamment de ce qu’il va d’odieux dans ses œuvres, il ne voit pas qu’il justifie toutes les sévérités, qu’il ne fait discréditer davantage encore la révolution, dont il prétend servir la cause, et qu’en se remettant dans la mémoire de la France sous une forme nouvelle et plus repoussante, il ne fait que lui rappeler ce qu’il lui a coûté déjà, les spectacles dont il l’a effrayée, les épreuves dans lesquelles il l’a plongée, les excès qu’il a suspendus sur elle, les suprêmes nécessités auxquelles il l’a conduite pour échapper à son joug. Tel est l’enseignement permanent qu’offre le fanatisme révolutionnaire sous toutes les formes, et qu’il rend plus saisissant encore lorsqu’il se dépouille, de tout voile pour n’être plus que le prosélytisme du meurtre.

Ce sont là au surplus des diversions douloureuses dans la vie d’un pays comme la France, qui, si les révolutions lui laissaient sa liberté, aurait tant de progrès à poursuivre, tant d’améliorations a réalises, tant d’intérêts à faire grandir. Le premier de ces intérêts peut-être, c’est la civilisation de l’Afrique, œuvre immense qui ne sera accomplie que lorsque la colonisation sera venue achever ce que les armes ont commencé. Quelque opposition, quelque défiance qu’ait rencontrée parfois la conquête de l’Algérie, elle ne constitue pas moins la seule grande tâche qui soit échue à notre pays depuis plus de trente ans. Tandis que d’autres peuples s’agrandissaient de toutes parts et répandaient au loin leur civilisation, toute notre action, pourrait-on dire, s’est concentrée sur cette terre, d’abord infructueusement, puis avec des chances plus heureuses, et enfin on a pu pressentir le jour où l’Algérie deviendrait une possession florissante de la France, — possession doublement acquise, par l’épée et par le travail. Ce n’est point de sitôt d’ailleurs que la protection de notre armée sera inutile, à la colonisation africaine. Nous disions un mot, il y a peu de temps, d’une expédition nouvelle qui vient d’avoir lieu. Comme