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jours, ce qui faisait vingt-cinq jours au bout de cent quatre ans, et ce temps écoulé, l’année de trois cent soixante-cinq jours se trouvait ramenée à l’année vraie. Ces cent quatre ans formaient le grand cycle mexicain. Alors, comme si le monde avait recommencé une nouvelle existence, ils renouvelaient tous les objets de leur culte et même les meubles et les ustensiles destinés à des usages privés ; ils rallumaient le feu sacré dans leurs temples. — Tel était le système du calendrier mexicain. Gama l’appelle le plus parlait de tous les calendriers ; on voit du moins qu’il était ingénieux et prouvait chez le peuple qui l’avait imaginé une civilisation assez avancée.

Je reviens à la description de la pierre astronomique de Mexico. Autour du soleil sont indiqués par leurs symboles les quatre autres soleils qui, dans les idées mexicaines, avaient précédé le nôtre et étaient morts avant lui. La mort de chacun de ces soleils avait été accompagnée de la destruction de l’espèce humaine. La première fois les hommes avaient été dévorés par des tigres à la suite d’une disette ; la seconde fois, de grands vents avaient renversé les maisons, et les hommes, enlevés par ces vents impétueux, avaient été changés en singes ; la troisième fois, ils avaient été attaqués par le feu et transformés en oiseaux : la quatrième enfin, submergés par un déluge et changés en poissons. Le soleil actuel devait mourir aussi, et avec lui le genre humain disparaître dans un incendie. Aussi, à la fin de chaque cycle de cent quatre ans, on craignait que la destruction de l’univers ne s’accomplit, et on recommençait le cycle suivant avec de grandes marques de joie, après que chacun avait fait couler un peu de son sang en l’honneur des dieux, et ce qui est plus fâcheux, après avoir immolé des victimes humaines. On trouve dans la plupart des cosmogonies, particulièrement dans celle des anciens Scandinaves, l’idée de ces époques successives séparées par des destructions et des renouvellemens que produisent l’eau et le feu. Il ne faut pas en conclure à un rapport historique entre les peuples qui ont eu ces idées, et voir, comme on l’a fait, dans un personnage merveilleux de la tradition mexicaine nommé Votan, le Woden ou Odin des peuples germaniques. Ces analogies peuvent avoir leur raison d’être dans l’unité de l’esprit humain, naturellement porté à expliquer par des suppositions semblables les origines qu’il ignore. La similitude des erreurs est une loi de notre nature aussi bien que leur variété. Peut-être dans cette croyance à des rénovations périodiques du monde se cache un souvenir traditionnel d’anciennes catastrophes géologiques. Les révolutions du globe terrestre, les phases de la vie organique à sa surface, semblent, d’après les opinions le plus généralement admises aujourd’hui dans la science, avoir pour causes de grands cataclysmes produits par les soulèvemens volcaniques et qui