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est peu remarquable. Le sol est en planches ; des figures de moines et de religieuses en bois peint rappellent les collections de Curtius à Paris ou celle de Mme Tussaud à Londres. Au-dessus du tabernacle, des anges couleur de chair soutiennent une madone dans les nuages. Au dehors, on retrouve l’architecture espagnole surchargée des deux derniers siècles ; les ornemens de la façade du Sagrario sont particulièrement tourmentés et fouillés. L’architecture mexicaine, c’est le goût espagnol outré par le génie sauvage.

Sur l’emplacement où s’élève la cathédrale était le grand téocalli ou temple mexicain. Autour d’une pyramide surmontée d’une chapelle se groupaient soixante-dix-huit édifices, sanctuaires, habitations des prêtres, etc. Dans le mur de la cathédrale, on a encastré le fameux calendrier mexicain, trouvé près de là, avec la statue de la déesse de la Mort, et la pierre dite des sacrifices. Le premier de ces monumens parait n’être qu’un fragment d’un morceau plus considérable et ne présenter que la moitié de l’année. Tel qu’il est, son poids est évalué à près de cinquante mille livres.

Un antiquaire mexicain, Gama, a consacré à l’examen de cette pierre une savante dissertation, à laquelle je renvoie ceux des lecteurs qui désireraient faire une connaissance plus particulière avec ce curieux monument astronomique[1]. J’en dirai seulement quelques mots. Au milieu est le soleil, la grande divinité des Mexicains, représenté par une tête vue de face et tirant la langue. À l’entour sont figurés les vingt mois solaires de dix-huit jours chacun dont se composait l’année mexicaine de trois cent soixante-cinq jours, en y comprenant cinq jours complémentaires. C’était exactement l’année des Égyptiens avec les jours épagomènes, et comme l’année véritable est plus longue de près de six heures, il fallait pour ce calendrier comme pour tous les autres une correction qui au bout d’un certain temps compensât ce que chaque année mexicaine perdait sur l’année véritable. Une correction de ce genre a été le problème à résoudre dans la formation de tous les calendriers. On sait comment il a été résolu dans le notre par les années bissextiles, qui intercalent tous les quatre ans un jour de plus après le 28 février, et suppriment ce jour complémentaire dans la dernière année de trois siècles sur quatre. Les Égyptiens remédiaient à la différence de l’année de trois cent soixante-cinq jours et de l’année vraie par leur période de quatorze cent soixante ans, au bout de laquelle les deux années se retrouvaient d’accord. Les Mexicains n’attendaient pas si longtemps. Au bout de cinquante-deux ans, ils ajoutaient alternativement douze et treize

  1. Description historica y cronologica de las dos Piedras que… se hallanron el año de 1790, por Antonio y Léon de Gama.