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cession du Milanais. L’Espagne et toutes ses autres dépendances, c’est-à-dire les Pays-Bas, la Sardaigne et les colonies, étaient données à l’archiduc Charles. Un terme de trois mois était accordé à l’empereur pour accepter ces conditions ; ce terme passé sans qu’il y eut adhéré, les trois puissances contractantes devaient désigner un autre prince pour hériter des états offerts à l’archiduc. En vertu d’un article secret, si le duc de Lorraine se refusait à accepter l’échange avantageux qu’on lui proposait, le dauphin, au lieu de la Lorraine, devait avoir ou la Navarre, ou le Luxembourg, au gré de l’Angleterre et des Provinces-Unies et le Milanais aurait appartenu à l’électeur de Bavière.

L’empereur n’accepta pas. Conformément aux habitudes de la politique autrichienne, le langage de la cour de Vienne ne fut pourtant pas assez positif pour que, de prime abord, on dût croire à l’impossibilité d’un accommodement. Celle des stipulations du traité contre laquelle le gouvernement autrichien élevait le plus d’objections, c’était l’interdiction qu’on y avait insérer de réunir jamais sur la même tête la couronne impériale et celle d’Espagne. Il exprimait contre Guillaume un très vif ressentiment, mais il essayait ou il feignait d’essayer de s’entendre avec Louis XIV. Il lui faisait offrir pour le dauphin toutes les colonies espagnoles, s’il voulait renoncer aux états d’Italie, ou bien, à la place de la Lorraine, la Sardaigne et le Luxembourg. De telles offres, dont l’acceptation eut excité au plus haut point contre la France la jalousie défiante de l’Angleterre et de la Hollande, étaient des pièges trop grossiers pour qu’on pût consentir seulement à les discuter. L’ambassadeur impérial, le comte de Zinzendorff, fut aussi chargé de poser au marquis de Torcy une question plus sérieuse ; il lui demanda si, dans le cas où les Espagnols en viendraient, avant le terme fixé pour l’acceptation du traité de partage, à offrir à un prince français la succession de Charles II, la France se considérerait comme engagée à repousser la proposition. Torcy n’hésita pas à répondre qu’on la repousserait ; il ne prévoyait pas un avenir bien prochain pourtant. Les trois mois de délai accordés à l’empereur pour faire connaître sa détermination s’écoulèrent de la sorte en stériles pourparlers. Il finit par déclarer qu’il ne pouvait accéder au traité de partage, qu’heureusement la santé du roi d’Espagne ne devait inspirer aucune inquiétude immédiate, mais que, dans le cas où ce prince viendrait à mourir, il se considérerait comme son seul et légitime héritier, et qu’il espérait que les trois puissances, avec lesquelles il désirait maintenir les relations les plus amicales, ne voudraient pas compliquer encore une question si délicate en désignant, aux termes du traité, un successeur au trône d’Espagne.

Tandis, qu’on s’efforçait sans succès d’obtenir l’adhésion de l’empereur