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Se taire ; mais si ce contradicteur lit ces lignes, il pourra prendre le guide de M. Sagansan, et il verra qu’en ajoutant 33 francs 33 centimes au prix d’une dépêche expédiée jusqu’à la frontière belge, ou bien 21 francs 83 cent. au prix de la dépêche de Paris à Strasbourg, il pourra envoyer à Florence par ces deux voies la dépêche ordinaire de vingt mots, et retenir tous les hôtels et toutes les maisons de campagne de Florence et des environs.

Jusqu’à 1840, la Belgique n’avait presque rien fait pour la télégraphie électrique. Une commission, ayant à sa tête l’astronome royal M. Quételet, examina la question et se prononça pour les fils portés par des poteaux, et non point pour le système souterrain de la Prusse et d’une partie de l’Allemagne. Les chemins de fer belges ont depuis lors établi des télégraphes électriques sur tout leur parcours, et avant la jonction récente de Strasbourg et de Bade par Kehl, Paris correspondait avec Berlin, Vienne et Venise, par la voie de la Belgique.

Dans la Hollande et dans le nord de l’Europe continentale, les télégraphes électriques ainsi que les chemins de fer n’ont pas fait de grands progrès ; mais le besoin s’en fait sentir plus impérieusement de mois en mois et presque de jour en jour.

Dans l’Allemagne et dans l’Europe centrale, il y a des télégraphes électriques sur tous les chemins de fer dont l’importance n’est pas minime. Ces routes et ces télégraphes traversent tous ces petits états si divisés, sans s’occuper de la délimitation des territoires. L’Autriche seule possède 5 ou 6,000 kilomètres de fils télégraphiques. L’Allemagne sans l’Autriche en a autant. Une grande partie est placée sous le sol et recouverte de gutta-percha ; mais il semble y avoir une tendance à revenir au système des poteaux, adopté originairement par Wheatstone et Cooke en Angleterre. La perte de force du courant transmis semble par là notablement diminuée.

Les états les moins commerçans du midi de l’Europe sont activement occupés à compléter leurs communications télégraphiques. La dépense est si excessivement petite, comparée à celle de l’établissement des voies ferrées, qu’il est probable que bientôt la longueur des fils électriques excédera de beaucoup celle des chemins de fer. Pétersbourg et Moscou sont ou vont être incessamment reliés non-seulement l’un à l’autre, mais encore avec les ports de la Baltique et de la Mer-Noire. Pétersbourg est déjà en communication avec Vienne par Varsovie et Cracovie. La Turquie elle-même, si dénuée de tout chemin de fer, étudie le plan d’un réseau télégraphique. L’Italie, a déjà plusieurs centaines de kilomètres de télégraphes. La Suisse vient de compléter plusieurs lignes, et l’Espagne entre à son tour dans la voie de la télégraphie électrique. Il n’est pas facile de présumer quel nombre de kilomètres seront en activité à la fin de 1853.

En Piémont, l’établissement du télégraphe électrique a donné lieu à de curieuses constructions. Le chemin de fer de Turin à Gênes est complet depuis Turin jusqu’à Arquata, et le télégraphe électrique suit la voie de fer ; mais de cette dernière station jusqu’à Gênes les travaux sont si dispendieux, que l’on sera peut-être longtemps encore à compléter cette route. Le télégraphe a franchi hardiment tous ces obstacles. Les fils ont été tendus de montagne en montagne, au travers de ravins d’une immense profondeur, et