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sur la plaine. Si les prévisions du colonel Rawlinson étaient fondées, ce mouvement du sol devait indiquer la présence de quelque ruine. M. Place résolut de s’assurer sur-le-champ de la vérité, et fit ouvrir une tranchée dans cet endroit. Quelle ne fut pas sa surprise, lorsqu’il rencontra presque à fleur de terre le sommet d’une pierre de marbre placée debout ! Continuant sa fouille, il en découvrit une seconde ; de proche en proche, sa tranchée s’agrandit et mit à jour quatre côtés d’une vaste chambre de vingt-cinq mètres huit centimètres de long sur vingt mètres quarante centimètres de large, toute revêtue de plaques de marbre. Ces plaques malheureusement ne présentent ni sculptures ni inscriptions qui puissent faire connaître la destination de la salle découverte ; peut-être, pour éclaircir ce point obscur, faudrait-il déblayer tout le pavé de la chambre. Toujours est-il que la première ondulation du sol qu’on ait attaquée cachait un édifice, et M. Place a constaté dans l’enceinte comprise entre les murailles ruinées la présence d’un certain nombre d’ondulations analogues.

Les découvertes faites jusqu’à ce jour à Khorsabad même ont été couronnées, on le voit, par de grands et beaux résultats pour lesquels on ne saurait trop féliciter l’agent qui, ne disposant que de bien faibles ressources, a dû, pour les obtenir, creuser de profondes tranchées, ouvrir de larges tunnels, déplacer et faire transporter à dos d’homme plus de quatre mille mètres d’une terre argileuse et compacte. L’exploration de M. Place ne s’est pas bornée toutefois au palais de Khorsabad et à ses dépendances, elle s’est étendue à un certain nombre de ces monticules artificiels que l’on rencontre sur la rive gauche du Tigre, dans un rayon de dix lieues autour de Mossoul. Cette exploration n’a pas été moins fructueuse. Accompagné de plusieurs brigades d’ouvriers et luttant d’activité avec le colonel Rawlinson, le consul de France a occupé et fouillé successivement plus de trente de ces monticules, tels que Bachiecha, Karamles, Tell-Leben, Maltaï, Karakock, Djigan, etc.

Pour opérer ces fouilles sur les bords du Zâb, où les catholiques chaldéens avaient signalé plusieurs de ces monticules encore inexplorés, il a fallu choisir la plus mauvaise saison, et profiter des débordemens du Tigre et de ses affluens, qui mettaient les explorateurs à l’abri des incursions des Arabes insoumis. Nos compatriotes se louent beaucoup de la résignation des ouvriers nestoriens et djibours qu’ils employaient, et qui, formant trois brigades de seize hommes chacune, les suivaient sans murmurer par les plus affreux chemins, malgré un vent et une pluie continuels. Grâce à la résolution et à l’activité du consul, cette petite armée de la science a pu explorer et prendre possession, à titre de premier occupant, de la