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M. Place supposa sur-le-champ que cette route devait conduire au monument reconnu par M. Botta, et cette hypothèse s’est trouvée confirmée par la plus intéressante des découvertes qu’il ait faites depuis.

En parcourant l’enceinte de la ville antique, M. Place avait remarqué, du côté du sud-ouest, une éminence assez élevée, se reliant à un monticule accidenté de même hauteur, et presque égale en superficie au monticule du grand palais. M. Botta l’avait indiquée dans son plan et assurait y avoir rencontré des traces nombreuses de constructions. Il importait d’explorer cette partie de la ville. Deux tranchées ouvertes sur les flancs du monticule opposé d’un côté à l’intérieur de la ville, de l’autre à la campagne, firent bientôt reconnaître deux murs parallèles composés de pierres du calcaire le plus dur et placées debout les unes à côté des autres. Ces murs, à leur base, étaient séparés par un intervalle de trois mètres dix centimètres de large, rempli par une sorte de dallage cyclopéen pareil à celui qu’on avait déjà reconnu au pied d’une autre éminence. Il n’y avait pas à en douter, c’était une des entrées de la ville. On fit suivre ces murs, et on reconnut qu’à vingt et un mètres du commencement, ils s’écartaient à angle droit à gauche et à droite, encadrant comme une espèce de salle ou plutôt de cour intérieure, telle qu’il en existe aux entrées de certaines villes d’Orient, pour faciliter la circulation des chars, des chevaux, des chameaux, lorsqu’il existe quelque encombrement. Décidé à éclaircir complètement ce point d’archéologie, résolu d’explorer à fond et une fois pour toutes un de ces monticules de l’enceinte, M. Place se transporta vers le centre de l’éminence, à égale distance de deux allées déjà reconnues, et fit ouvrir une troisième tranchée sur le point culminant. Là, après quatre jours de travaux, il mit à découvert une large voûte en plein cintre, en briques, appuyée sur des contre-forts également en briques. C’était, à n’en pas douter, le haut de la porte à laquelle conduisaient les deux entrées découvertes et le chemin cyclopéen. Cette porte, construite en grandes briques convergeant vers un centre, — et qu’entoure une double rangée de briques couchées, traçant comme un double cordon à l’intérieur et à l’extérieur, — est encastrée dans un mur aussi élevé qu’elle et recouvert d’une couche de chaux formant sans doute la base d’une tour qui la dominait et la défendait. À en juger par la vue photographiée qu’en a prise un dessinateur attaché à l’expédition, le sommet de cette porte affleure, à un mètre environ, le sol qu’elle a soutenu et qui, tout en l’ensevelissant, n’a pu l’écraser. Ces terres et ces décombres, qui pénètrent sous ses parties voûtées et dans les moindres interstices, sont d’une extrême dureté. D’où provient une masse de terre si considérable ? On a peine à se l’expliquer, car il est peu probable