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SOUVENIRS D'UNE STATION


DANS


LES MERS DE LINDO-CHINE.




AMARAL ET LES PIRATES CHINOIS.[1]




I

Après avoir visité les Indes néerlandaises et les colonies espagnoles, nous avions hâte de regagner les côtes du Céleste Empire. Nous ne pouvions cependant, songer à rentrer à Macao sans nous être arrêtés à Singapore. Ce comptoir anglais est un des points de la Malaisie qu’il faut nécessairement connaître, si l’on veut se faire une idée exacte du triple rôle qu’affecte l’intervention européenne dans les mers de l’Indo-Chine.

Partis de Batavia le 1er août 1849, nous franchîmes rapidement le canal qui sépare l’île de Banca, célèbre par ses mines d’étain, des côtes basses et marécageuses de Sumatra. Sept jours après notre départ, nous nous trouvions à la hauteur de l’île Bintang, dont le pic aigu se perdait dans les nuages. La brise était fraîche, et nous pûmes, avant le coucher du soleil, dépasser le rocher de Pedra-Branca, posté comme un dieu Terme a l’entrée du détroit de Singapore. Nous nous dirigions, guidés par les dernières lueurs du jour, vers cette île, encore cachée sous l’horizon, quand une longue pirogue, montée par deux rameurs, réussit à nous accoster, malgré la rapidité de notre sillage. Équipage et pirogue, nous crûmes un instant que tout allait disparaître dans l’écume que nous soulevions autour de nous ; mais,

  1. Voyez la livraison du 15 février et du 1er mars.