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Dans le premier moment, on fut ébloui et l’on crut avoir fait un grand pas.

En effet, le point principal, la construction d’un canal navigable entre les deux océans était emporté. Le traité disait dans son teste ; et les pièces officielles qui y étaient jointes pour en fixer le sens stipulaient expressément que la négociation avait pour but spécial de garantir et d’enchaîner la volonté des deux puissances à l’accomplissement de cette grande œuvre ; elles s’engageaient positivement à y contribuer de tous leurs efforts, elles promettaient même d’employer leurs bons offices auprès de leurs alliés pour obtenir la coopération de tous les peuples civilisés, et faire de cette entreprise, ainsi que M. Miles l’avait proposé, une entreprise commune au commerce de toutes les nations appelées à participer aux dépenses ; selon le degré d’utilité qu’elles en retireraient, et aux produits selon l’importance des recettes qu’elles lui procureraient. Enfin, dans l’élan de leur libéralisme et comme preuve de la sincérité de leurs intentions, les parties contractantes allaient jusqu’à convenir que les provisions du traité s’étendraient à tout canal capable de porter des bâtimens de mer et même à tout chemin de fer qui pourrait être construit depuis l’isthme de Darien au sud, sur le territoire de la Nouvelle-Grenade, jusqu’à l’isthme de Tehuantepec ; sur le territoire du Mexique. Cependant, comme alors on ne croyait encore à la possibilité de la canalisation qu’à travers le territoire de l’Amérique centrale et de l’état de Nicaragua, c’était à propos de ce pays seulement que le traité contenait des stipulations précises et définies ; les trois principaux articles en feront apprécier le caractère :


« Les gouvernemens de la Grande-Bretagne et des États-Unis déclarent par les présentes que ni l’un ni l’autre ne cherchera jamais à obtenir ou à garder pour lui aucun contrôle exclusif sur ledit canal : ils arrêtent que ni l’un ni l’autre n’élèvera ou n’entretiendra de fortifications permanentes sur son parcours ou dans son voisinage, qu’ils n’occuperont, ne coloniseront et ne tiendront sous leur suprématie ni l’état de Nicaragua ; ni celui de Costa-Rica, ni La côte des Mosquitos, ni aucun point de l’Amérique centrale, qu’ils n’useront ni du protectorat qu’ils possèdent ou pourront posséder, ni d’aucune alliance qu’ils ont contractée ou qu’ils pourront contracter avec aucun peuple ou aucun état pour élever ou entretenir aucune fortification, pour occuper, fortifier ou coloniser le Nicaragua, le Costa-Rica, la côte des Mosquitos ni aucun point de l’Amérique centrale, ni pour s’attribuer ou exercer aucune suprématie sur ces pays ; de même ni la Grande-Bretagne ni les États-Unis ne se prévaudront d’aucune amitié, alliance, relations ou influence pour acquérir ou conserver directement ou indirectement aux citoyens ou aux sujets de l’une ou de l’autre des parties aucuns droits ou avantages relativement au commerce ou à la navigation dudit canal qui ne seraient pas offerts