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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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14 juin 1853.

Reprenons cette longue et éternelle histoire des affaires d’Orient où s’absorbent désormais tous les événemens, toutes les préoccupations secondaires de la politique. Rien n’est vraiment plus curieux que de voir comment les complications s’enchaînent au point de mettre en présence les plus puissans intérêts, comment les questions se nouent, se développent et se révèlent tout à coup dans une redoutable gravité, suspendant l’épée, la fatale épée des combats, sur la paix, la sécurité, les relations des peuples. En quelques jours, les péripéties se succèdent, les perspectives les plus extrêmes et les plus sombres se dévoilent. L’incident de la veille n’est point connu, qu’on attend avec une fébrile impatience L’incident du lendemain, l’opinion publique passe par toutes les alternatives de la confiance et d’une crainte souvent démesurée ; les valeurs du crédit subissant les plus brusques et les plus étranges variations, comme s’il ne restait plus d’autre issue qu’un conflit gigantesque, uni, sans doute, la situation où les derniers actes de la diplomatie russe ont placé le continent est loin d’être facile et d’une favorable apparence. On pourrait même dire à ce propos que l’Europe n’est pas heureuse. Quand elle n’est point secouée jusque dans les fondemens de sa constitution intérieure, il faut qu’elle tienne tête à des épreuves d’un autre genre ; lorsqu’elle est remise à peine de ses commotions récentes, les diversions extérieures s’élèvent. Il y a cependant une réflexion qu’il faudrait faire, c’est que ce n’est point avec des paniques d’opinion et de crédit qu’il est possible de faire face à des complications comme celles qui viennent de naître. Les paniques ne résolvent rien et n’aident à rien résoudre ; elles ne sont que les coups de tête de la faiblesse. Il est des questions devant lesquelles les peuples ont besoin de se conduire avec un peu plus de sang-froid, lorsque les occasions souveraines viennent pour eux de s’interroger sur ce qu’ils peuvent et ce qu’ils doivent, comme, en ce moment. Les affaires d’Orient en effet, on ne l’ignore pas, se