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M. Delaroche, quoique les chairs et certaines draperies aient dans cette planche une apparence un peu métallique ; Faust et Marguerite, par M. Blanchard, d’après M. Scheffer, malgré la pâleur du ton et la précision un peu sèche du dessin ; enfin la Fuite m Égypte, par M. Grébert d’après M. Watelet, planche de paysage traitée en général avec conscience et, dans quelques parties, avec une véritable habileté. Il serait bien moins permis encore de ne pas rendre hautement hommage au rare talent que M. Henriquel-Dupont a déployé dans son dernier ouvrage. Le beau travail de M. Henriquel-Dupont, d’après l’Hémicycle du palais des Beaux-Arts, peint par M. Delaroche, est le plus important d’un œuvre déjà si considérable et si bien rempli : on y retrouve toutes les qualités qui depuis longtemps ont placé l’artiste au premier rang des graveurs contemporains ; on y remarque aussi l’empreinte de qualités nouvelles. À côté de la grâce et de la souplesse familières à ce savant burin, une puissante résolution dans le faire signale un progrès inespéré et comme une seconde manière. On savait de reste que la planche de M. Henriquel-Dnpont serait un modèle de correction, de goût et de délicatesse : avait-on le droit de s’attendre à tant de fermeté et d’ampleur ? Les modifications mêmes apportées par le graveur dans l’effet de la peinture originale témoignent de cette franchise de sentiment. Veut-on un exemple ? Le parti de demi-teinte adopté pour les marches derrière la figure qui lance les couronnes, le ton clair de cette figure sont précisément en sens inverse de l’effet indiqué par le pinceau ; mais de pareilles infidélités n’ont rien que d’heureux et de louable, et M. Delaroche les aura sans doute approuvées le premier, parce qu’elles tournent au profit de l’aspect large et de la simplicité de l’ensemble.

Bien que les estampes admises au salon n’excitent pas en général un intérêt fort vif, et que les tableaux ou les sculptures attirent à peu près seuls les regards de la foule, on peut dire cependant que la gravure, a sa part d’importance dans les expositions annuelles. Quiconque voudra examiner les diverses planches d’histoire, de portrait ou de genre envoyées par les graveurs au burin, à l’eau forte ou à l’aqua-tinte, pourra se former une idée exacte de l’état de la gravure dans notre pays : quelle idée incomplète n’aurait-on pas au contraire de l’état de l’architecture en France, si on en jugeait par les rares travaux exposés ! On croirait, à vrai dire, que ce bel art n’existe plus, ou que les hommes qui le pratiquent encore n’ont rien de mieux à faire qu’à enregistrer soigneusement les témoignages du passé, à recueillir les débris de toutes les époques, les reliques de tous les styles. La passion des recherches archéologiques et la science, des restaurations semblent seules donner quelque vie à notre école d’architecture ; mais de style qui lui soit propre, elle n’en a pas ; d’efforts pour déduire un type architectural de nos idées et de nos mœurs elle n’en tente guère : tout se borne à quelques projets conçus dans des formes inconciliables avec les besoins de notre civilisation, à quelques essais d’imitation de l’art grec, de l’art du moyen âge, de la renaissance franco-italienne, et à des études d’après les édifices en ruines. — Voilà ce, que pourrait penser tout homme qui ne connaîtrait d’autres spécimens du talent de nos architectes que les dessins exposés, et cependant rien ne serait plus faux qu’une opinion basée seulement sur de telles preuves. La plupart des architectes