qui ont contribué à la fortune du Times le capitaine Sterling, dont le talent d’amplification est demeuré célèbre. Walter envoyait à Sterling un sujet avec les deux ou trois argumens à employer, et il en recevait en retour un de ces articles pleins d’éclat, de vigueur et d’entraînement qui ont donné lieu à cette locution proverbiale : Les coups de tonnerre du Times. N’oublions pas non plus Henry Brougham, qui a pris plus d’une fois une part active à la rédaction du Times. La médisance prétend même que lord Brougham, devenu lord-chancelier d’Angleterre et assis sur le sac de laine, se défendait dans le Times et s’attaquait dans le Morning Chronicle afin d’avoir à se défendre.
Thomas Barnes est mort en 1841, et la rédaction en chef du Times est en ce moment entre les mains de M. John Joseph Lawson, sous la direction suprême du troisième des Walter.
C’est à M. Walter que revient l’honneur d’avoir mis la vapeur au service de l’imprimerie. Dès 1804, il s’était convaincu de la possibilité de substituer cet agent infatigable aux bras des pressiers, et de donner au tirage du Times une régularité et surtout une rapidité que la prospérité croissante du journal rendait nécessaires. Les presses du Times tiraient à l’heure 250 feuilles imprimées d’un seul côté : avec beaucoup d’effort et d’habileté, et en relevant plusieurs fois les pressiers, on arrivait à doubler ce tirage. On se voyait quelquefois obligé de faire deux, trois et jusqu’à quatre compositions pour ne point paraître plus tard que les autres journaux; trois mille exemplaires en effet eussent exigé douze heures de travail. Walter ouvrit les ateliers du Times à un mécanicien nommé Martyn, qui y travaillait dans le plus grand mystère, parce que les pressiers avaient déclaré hautement qu’ils feraient un mauvais parti à celui qui voulait leur ôter leur gagne-pain, et qu’ils mettraient en pièces ses inventions. Après des dépenses considérables, Walter dut renoncer à son entreprise, parce que ses ressources personnelles étaient épuisées et que son père lui refusa de nouvelles avances.; mais avec la persévérance et le ferme vouloir qui était le fond de son caractère, il n’en poursuivit pas moins la solution du problème qu’il s’était imposé, provoquant et récompensant avec libéralité toutes les inventions qui pouvaient le conduire au but. Enfin en 1814 il accueillit les offres de deux Allemands nommés Kœnig et Bauer, et leur livra une vaste pièce adjacente aux ateliers du Times, où ils purent construire leur machine sans éveiller les soupçons des pressiers. Au moment de terminer leur œuvre, Kœnig et Bauer perdirent courage et disparurent. On les retrouva au bout de quelques jours, on les ramena, et ils mirent la dernière main à leur machine. Il s’agissait ensuite d’en faire usage. Les pressiers du Times étaient venus à l’atelier à l’heure ordinaire : on ne descendit point les formes, et on dit aux ouvriers que l’on attendait des nouvelles importantes du continent. Il était six heures du matin quand M. Walter entra dans l’atelier, un exemplaire du Times à la main, et annonça aux ouvriers étonnés que leur besogne était faite par une presse à vapeur. C’est le 29 novembre 1814 que fut tiré le premier journal imprimé à la vapeur. Les presses du Times devinrent aussitôt une des curiosités de Londres; les premières tiraient seulement de douze à treize cents feuilles à l’heure; des perfectionnemens ne tardèrent pas à porter ce tirage à 2,000 et même à 2,500 en fatiguant un peu la machine; les presses actuelles, dues à M. Applegath, tirent 10,000 feuilles