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de l’étoile de la jeunesse, elle saluait le futur empereur militaire dont les circonstances lui faisaient souhaiter l’avènement !

Les jours d’épreuve étaient passés, l’arrivée tant réclamée du corps de réserve venait enfin le 25 mai augmenter de dix-neuf mille hommes l’effectif du maréchal. Les rôles allaient changer : c’était à Radetzky maintenant de prendre l’offensive et de poursuivre cet adversaire qu’il avait jusque-là évité en si ingénieux et si consommé tacticien.


II

« C’était par une magnifique nuit de printemps ; le roulement de nos fourgons nombreux, de nos équipages, ébranlait l’air comme un grondement de tonnerre. À une distance assez rapprochée brillaient les feux de bivouac de l’ennemi, dont nous longions les avant-postes à une portée de canon. À la tête du second corps d’armée, ayant à ses côtés le futur souverain de l’Autriche, s’avançait à cheval Radetzky, gai, dispos, l’œil rayonnant, le visage en belle humeur. Par intervalle un coup de feu lointain, échangé entre nos patrouilles et les avant-postes ennemis, troublait seul le calme de la nuit. »

Ainsi on quittait Vérone, ainsi on marchait allègre et joyeux à la journée de Curtatone, où les Toscans de Laugier furent défaits, à la journée de Vicence, où les Romains de Durando trouvèrent leurs fourches caudines. Dès le soir du premier jour d’attaque, Vicence n’était plus tenable pour les Italiens, forcés dans leurs derniers retranchemens intérieurs. Toutes ces hauteurs des Monti Berici, ces délicieuses collines que surmonte l’église et le cloître de la Madona del Monte, et au pied desquelles s’étend la ville au sein d’un paysage vraiment édénique, les Autrichiens victorieux les occupaient lorsque la nuit vint mettre fin au combat. « Sous nos yeux se déroulait la cité magnifique si richement dotée par le génie de Palladio. Le maréchal allait s’en retourner à son quartier-général après avoir pris toutes ses dispositions, le feu devait se rouvrir au jour levant, nos colonnes se massaient aux portes de la ville, et, de l’éminence où nous étions, nous pouvions en un moment anéantir Vicence sous une pluie de bombes et d’obus. L’issue de cette affaire avait donc cessé pour nous d’être douteuse, mais nous nous demandions ce qui adviendrait de tant de chefs-d’œuvre pendant l’assaut du lendemain. » La question était superflue : Vicence capitula. Déjà, vers le déclin du jour, au plus chaud de l’action, le drapeau blanc avait été vu flottant çà et là sur divers points ; il est vrai que presque aussitôt le drapeau rouge l’avait partout remplacé. On prétend que ce furent les gardes nationaux vicentins qui prirent sur eux de couper cour aux préliminaires pacifiques ; mais Durando, vieux soldat, et, comme