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pauvre Bessy est tout le jour sur les jambes, afin que tout soit aussi propre que possible ; ma principale occupation, après tirer le vin, est de tenir le petit Tom tranquille. Tout s’est passé très gaiement. Nous avons fait notre possible pour rendre nos gens heureux ; il faut reconnaître que nos hôtes semblent être venus tous avec le parti pris de s’amuser. Soupe à minuit et demi. J’avais fait venir des homards, des huîtres et du Champagne de Londres exprès pour la circonstance, et le souper a été non-seulement gai, mais élégant. Vingt-deux personnes ont soupé dans mon petit cabinet. J’ai chanté après le souper, puis l’on a encore dansé jusqu’à quatre heures du matin. Joyeux commencement pour la nouvelle année. Dieu fasse que cela continue et qu’ainsi « nos jours et nos nuits, avec toutes leurs heures, s’en aillent en dansant sur la pointe du pied. » On voit ici, comme par une fenêtre de son cottage ou à travers la grille de son jardin, le Tom Moore que nous avons essayé de dépeindre, homme d’intérieur, de travail, délicat, de douce flânerie, fou de musique, toujours amoureux des réunions et des fêtes, même sous la menace d’un grand malheur. À travers cette paix enjouée, la tristesse pourtant ou quelque attendrissement pénible commençait déjà à jeter parfois un nuage. — 11 janvier 1819. Une remarque d’un article sur mes dernières Mélodies m’a fait en quelque sorte froid au cœur. « Nous pouvons reconnaître l’influence de l’âge qui s’avance aux feux maintenant plus calmes du moderne Anacréon. » Hélas ! ce n’est que trop vrai » Je vais avoir bientôt accompli mon huitième lustre. — 13. Le Mémoire de Cribb (une nouvelle satire politique) est presque fini. Je me suis promené quatre heures. La journée était exquise. J’ai senti des élans de dévotion en me promenant et en contemplant le monde glorieux autour de moi, qui m’ont fait plus de bien que des volumes de théologie. – 20 février. Une tristesse sur moi, quelquefois semblable à celle des jeunes années et agréable, mais quelquefois mêlée de reproches que je m’adresse, et par conséquent pénible. — 11 avril. Commencé des paroles sur un très joli air français. Splendide coucher du soleil ce soir ; si je m’étais laissé aller, j’aurais pleuré comme un enfant aux pensées qui me venaient devant ce spectacle : je pensais au peu que j’ai fait dans ce monde, et à tout ce dont mon âme se sent capable. Mais il y a certainement une sphère meilleure pour ceux qui n’ont fait que commencer leur course dans celle-ci. – 23. À mon arrivée chez moi, j’ai trouvé une lettre de Toller (son avocat) renfermant des déclarations de mes parties adverses, et demandant des instructions, car mes adversaires veulent pousser les choses aux extrémités. La catastrophe est donc à la veille d’éclater. Cela m’a un peu attristé, car j’avais presque oublié toute l’affaire, et voilà qu’elle revient sur moi plus sombre que jamais. C’est peut-être pour le