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d’un clair feuillage laisse pendre de longs fruits à l’enveloppe charnue, que le soleil a dorés de tons jaunes ou vermeils. Si vous ouvrez cette écorce rugueuse, au milieu de la pulpe blanchâtre vous trouverez répandues les graines qui contiennent la précieuse amande. Le cacao se vend communément à Menado 1 franc 73 centimes le kilogramme. Cette culture avait contribué à répandre une certaine aisance parmi les habitans de Menado. Quelques jardins comptaient plus d’un million d’arbres, et la récolte annuelle s’élevait à 93,000 kilogrammes ; mais depuis le tremblement de terre du 8 février 1845, qui détruisit un grand nombre d’habitations, les cacaotiers de Menado ont été atteints d’une maladie qui paraît menacer sérieusement l’avenir de ces florissantes plantations. Nous avons vu des parcs immenses où les trois quarts de la récolte se trouvaient avariés : sous une enveloppe en apparence intacte se cachait le fungus rongeur. On eût cru voir ces fruits décevans dont parle l’Écriture, qui ne sont à l’intérieur que cendres et poussière.

À ces trois produits principaux, le riz, le cacao et le café, on pourrait joindre le gomoutou, espèce de cordage fabriqué avec les fibres ligneuses du palmier areng et expédié à Java pour le service de la flotte coloniale ; mais une source de revenu bien autrement importante, c’est l’or que l’on extrait du district de Gorontalo. Cet or, répandu en paillettes presque imperceptibles dans une roche calcaire, se recueille dans quatre-vingt-trois mines. Le sultan, qui nourrit ses malheureux sujets avec deux ou trois bananes par jour, s’est engagé à livrer annuellement au gouvernement hollandais plus de 3,000 onces d’or, à raison de 34 fr. l’once. Il est loin cependant de remplir exactement les conditions de ce contrat. Les pros bouguis transportent chaque année à Singapore quatre fois plus d’or que n’en reçoivent les autorités de Menado.

Les Bouguis ont été de tout temps, par leurs habitudes de contrebande, les ennemis déclarés du fisc hollandais. Les habitans de Menado ne se sont point laissé tenter par leur exemple. Sur toute la côte septentrionale de Célèbes, on ne verrait pas un seul pro, pas même une embarcation de pêcheur. La crainte que leur inspiraient les pirates de Soulou paraît avoir à jamais dégoûté les Harfours de la navigation. Ce sont les habitans des îles Sanguir, moins étrangers par nécessité au métier de la mer, qui construisent et manœuvrent la flottille avec laquelle le résident de Menado parcourt solennellement le littoral de la province à certaines époques de l’année. Les navires de commerce qui visiteront la rade de Menado ne devront donc compter que sur leurs propres moyens pour embarquer ou pour porter à terre leur cargaison.

Avant les récentes mesures qui ont ouvert trois des ports de l’île