d’ardentes préoccupations dans les principaux foyers commerciaux ; mais il semble qu’elle soit sur le point d’entrer aujourd’hui dans une phase nouvelle. Jusqu’à présent, c’était à qui aurait une tête de ligne pour les États-Unis ou l’Amérique du Sud entre les villes commerciales les plus considérables : — Le Havre, Bordeaux, Nantes, Marseille. La difficulté était de concilier toutes ces prétentions, outre qu’au dernier moment il se trouvait toujours quelque impossibilité résultant soit de la situation, soit de l’imperfection des divers ports de commerce. Or, tandis que Le Havre, Bordeaux, Marseille, se disputent la prééminence, le gouvernement parait dans l’intention de trancher la difficulté en faisant d’un port de guerre, de Cherbourg, par exemple, l’unique point de départ des paquebots destinés à relier la France au Nouveau-Monde. Le gouvernement se montrerait disposé à concéder le privilège à une seule compagnie, qui serait tenue d’entretenir un assez grand nombre de paquebots, lesquels pourraient, au besoin, être mis au service de l’état et former une flotte à vapeur d’une certaine importance. Ici, on le voit, l’intérêt politique vient se joindre à l’intérêt commercial d’une manière plus sensible. Nous ne saurions rechercher en ce moment si cette considération est de nature à compliquer la solution ou à la rendre plus facile. L’un et l’autre peut être vrai à la fois. Toujours est-il que, quelque décision qui soit prise, les difficultés de divers genres qui se rattachent à cette sérieuse affaire ne peuvent manquer d’être prochainement résolues.
Pour statuer souverainement sur ce grave intérêt comme sur bien d’autres, le gouvernement est d’autant plus à l’aise aujourd’hui qu’il est politiquement plus affranchi. Il n’est point embarrassé à coup sûr par les contestations, par l’action intérieure des partis disciplinés et en armes. Les partis au contraire semblent se dissoudre et se démembrer chaque jour sous nos yeux, aussi incertains sur ce qu’ils doivent faire que sur ce qu’ils doivent éviter. Lorsque M. de Pastoret et M. de La Rochejacquelein entrent au sénat, lorsque tant d’autres, à des titres différens, prennent part à l’administration publique, ce n’est point évidemment l’abdication du parti légitimiste, mais n’est-ce point le signe de cette dissolution dont nous parlons ? Et n’en est-il pas toujours de même ? Tant que les grandes questions de gouvernement sont en suspens et que la victoire peut échoir au plus actif, au plus habile, au plus heureux, les partis ont une raison d’être ; ils s’entretiennent dans leur ardeur et leur discipline ; ils ont devant eux l’horizon et l’avenir. Dès que ces questions sont résolues, le plus grand élément de cohésion, l’espoir du succès, leur manque ; le sol fuit sous leurs pieds. Il n’y a plus de partis à vrai dire ; il n’y a que des individualités dispersées qui règlent leur conduite sur leurs intérêts, leurs convenances, leurs ambitions, leurs ressentimens, ou se rattachent même au pouvoir par un mobile plus honorable, celui de servir le pays en tout état de cause. Encore ce ne sont point ceux-là souvent qui, par leur promptitude à trouver partout leur place, font le plus de mal à leur parti ; ce sont ceux qui, au milieu de la dissolution, excellent à diviser encore, ceux qui réussissent à beaucoup empêcher pour ne rien faire, ceux qui se font de petites églises où ils récitent chaque jour l’oraison qui doit les sauver ; ce sont ceux qui restent insensibles au mouvement des choses, et font de leur immobilité une sorte de reproche pour tout le monde. Malheureusement c’est là un genre de disso-