Page:Revue des Deux Mondes - 1853 - tome 1.djvu/288

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

production du lait, des résultats comparables et souvent supérieurs à ceux qu’on obtient en Angleterre montrent que nous sommes en général placés, pour cette industrie, dans d’aussi bonnes conditions que nos voisins; mais si nos races laitières valent autant et quelquefois plus que les leurs, elles ne sont pas aussi répandues.

Il n’y a en Angleterre aucune espèce de vaches qui dépasse sensiblement nos vaches flamandes, nos normandes, nos bretonnes, pour la quantité et la qualité du lait, ainsi que pour la proportion du rendement en fait à la quantité de nourriture consommée. Quant aux produits de la laiterie, si les fromages anglais sont en général supérieurs aux nôtres, le beurre français est bien au-dessus du beurre anglais ; il n’y a rien en Angleterre de comparable aux bonnes qualités de beurre que produisent la Bretagne et la Normandie. Malgré ces avantages incontestables, le produit total des vaches anglaises eu lait, beurre et fromage dépasse de beaucoup le produit des vaches françaises, bien que celles-ci soient plus nombreuses, et sur certains points aussi bonnes ou même meilleures laitières. C’est la généralité d’une pratique qui peut seule donner de grands résultats en agriculture, et l’entretien d’une ou plusieurs vaches laitières est une pratique universelle en Angleterre.

La race laitière par excellence de l’empire britannique est originaire de ces îles de la Manche, fragmens détachés de notre Normandie. On la désigne généralement sous le nom de l’île d’Alderney, qu’on appelle en français Aurigny. Les précautions les plus minutieuses sont prises pour maintenir la pureté de cette race, qui n’est, au bout du compte, qu’une variété des nôtres. Les îles de la Manche produisent beaucoup de génisses vendues pour l’Angleterre, et fort recherchées par les gens riches pour leurs laiteries de campagne. Quiconque a fait le voyage de Jersey a pu admirer ces jolies bêtes, à l’air si intelligent et si doux, qui peuplent les pâturages de cette île, et qui font partie de la famille chez tous les cultivateurs. Elles sont naturellement bonnes sans doute, mais les soins affectueux dont elles sont l’objet n’ont pas peu contribué à les rendre si productives. Les habitans de Jersey en sont fiers et jaloux comme d’un trésor unique au monde.

Cette race trouve cependant une rivale dans une autre qui lui ressemble beaucoup, et qui doit en être sortie par des croisemens : c’est celle du comté d’Ayr, en Écosse. Il n’y a pas longtemps que l’Écosse en général était dans un état d’inculture presque complet; le comté d’Ayr en particulier n’est cultivé avec quelque soin que depuis cinquante ou soixante années. Cet ancien pays de bruyères et de marais est devenu une sorte d’Arcadie. Robert Burns, le berger poète, y est né ; ses poésies champêtres, qui datent de l’époque de la