s’engraissent en général vers deux ans, et se vendent après leur seconde tonte. Leur chair est considérée comme meilleure que celle des nouveaux Leicester. Le poids de leur toison a doublé comme celui de leur corps, et comme ils ont conservé l’habitude du pâturage pendant l’été, ils ont gardé leur tempérament robuste et leur rusticité primitive.
On a calculé que les dunes du comté de Sussex et les plaines qui les avoisinent devaient nourrir aujourd’hui un million de moutons améliorés, et la race n’est plus renfermée dans ses anciennes limites, elle en est sortie pour se répandre au dehors, soit en se substituant purement et simplement aux variétés locales, soit en s’y mêlant et en les transformant de fond en comble par des croisemens; elle a pénétré partout où le sol, sans être assez riche pour nourrir des Dishley, l’est assez cependant pour joindre à de bons pâturages d’été une suffisante alimentation d’hiver. Elle domine dans toutes les contrées de formation calcaire; elle tend à remplacer les anciennes espèces des comtés de Berks, de Hants et de Wilts, et dans le nord, on la retrouve jusque dans le Cumberland et le Westmoreland.
L’histoire des moutons Cheviot n’est pas tout à fait aussi brillante que celle des Dishley et des South Downs. Cette race n’est pourtant pas moins précieuse que les autres en ce qu’elle permet de tirer tout le parti possible de régions froides et incultes. Sortie des montagnes intermédiaires entre les hautes chaînes du nord de l’Angleterre et les terres cultivées, elle a dû son amélioration, comme les South Downs, à un supplément de nourriture artificielle pendant l’hiver, autant du moins que l’ont permis les lieux agrestes où elle vit; elle a été de plus, autant qu’aucune autre, l’objet de sélections conduites avec beaucoup de soin, et ses formes sont aujourd’hui aussi parfaites que possible. Les moutons Cheviot perfectionnés s’engraissent dans leur troisième année, et donnent en moyenne 30 à 40 kilos d’excellente viande. Leur toison est épaisse et courte ; ils passent l’hiver même sur leurs montagnes, exposés à toutes les intempéries des saisons, et ne s’abritent jamais dans des bergeries.
En Angleterre, les Cheviot n’ont guère été introduits hors de leur pays natal que dans les parties les plus montagneuses du pays de Galles et de Cornouailles. En Écosse, au contraire, où ils ont été importés par sir John Sinclair, ils se sont répandus en très-grand nombre; ils ont commencé par envahir les highlands du sud, et ils ont pénétré de là, en suivant les monts Grampians, jusqu’aux extrémités septentrionales, où ils se propagent avec rapidité. Partout, dans ces régions élevées et orageuses, ils disputent le terrain à une autre race encore plus rustique, la race à tête noire des bruyères, qui recule peu à peu devant eux, leur abandonnant les meilleures prairies pour se réfugier sur les cimes les plus sauvages.