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ADELINE PROTAT.

était dans l’atelier, tira d’un buvard une feuille de papier à lettre sur laquelle il écrivit quelques lignes, fit sécher l’écriture à la flamme de la bougie, cacheta la lettre en hésitant un moment à choisir le pain à cacheter ; puis, du ton d’un homme qui en appelle à un souvenir, il murmura tout bas : — Il était bleu. — Et la lettre fut fermée d’un cachet bleu. Ce travail achevé, Lazare s’en fut décrocher la glace qui était sur la cheminée, l’appuya sur la table où il vint s’asseoir, disposa la lumière d’une certaine façon, et commença, d’après lui-même, un dessin sur un feuillet d’album déjà plein de croquis. Ce travail lui prit une demi-heure.

Le dessin terminé, Lazare le mit auprès de sa lettre, et, débouclant son sac de voyage, il parut y chercher quelque chose qu’il ne put trouver sur-le-champ, sans doute à cause du désordre qui avait présidé à la confection de sa valise. Drôle de fille ! murmurait le peintre en fourrageant dans son sac avec impatience ; me voler mon lorgnon, et encore il était cassé ! Après ça, l’amour fait relique de tout. Diable de paquet, où l’ai-je fourré ? Ah ! voilà ! — Et il ouvrait une petite boîte dans laquelle étaient renfermés une demi-douzaine de lorgnons dits monocles pareils à celui qu’il portait au cou. — Dire, continua Lazare, qu’il y a des êtres qui portent ça comme un ornement ! c’est bien gai d’être myope ! Si on laisse tomber son lorgnon par terre, il faut en acheter un second pour retrouver le premier. — Et tout en parlant il cassait la queue d’un des monocles pris dans sa boîte. — Et maintenant, dit-il en ajoutant le lorgnon à la lettre et au portrait, avec ces trois choses-là, j’aurai le secret de Zéphyr… Oui… mais il est malin, et serait capable de ne pas les reconnaître : j’ai eu l’imprudence de me faire plus joli dans cette seconde édition de mon image que je ne l’étais dans la première ; la seconde lettre est toute fraîche, l’autre était coupée par les plis. Zéphyr ne croira pas… Attends un peu, Zéphyr. — Et Lazare, ayant décacheté la lettre, la frippa légèrement, la frotta sur le carreau, dont la poussière vint adhérer au papier, et finit par la tremper dans une cuvette d’eau. Le portrait fut soumis à la même opération.

— À présent, dit Lazare en se mirant, comme on dit, dans son ouvrage, lettre et portrait sont méconnaissables, raison de plus pour que Zéphyr les reconnaisse. Résumons la situation et le plan de conduite à tenir. Me rendre indifférent à Adeline, elle ignore que je suis instruit de ce qui se passe dans son cœur et n’attribuera pas mes façons d’agir à une ruse ; rendre Adeline indifférente à Zéphyr, et, tout en travaillant à rendre la paix à ces deux cœurs troublés, empêcher que Protat n’évente le secret de sa fille et celui de son apprenti ; de plus, empêcher que les curieux de ce pays-ci soupçonnent un seul instant tout ce que le sabotier était en chemin de soupçonner tout à