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considérables, et placent annuellement jusqu’à cent millions de journaux, de revues et de brochures. Ces maisons se chargent de distribuer les journaux dans Londres, elles les font vendre au besoin dans la rue, elles les expédient en province. Le timbre de dix centimes qui frappe les journaux anglais sert en même temps de droit de poste : il leur donne le droit de circuler gratis. Cependant le transport par la poste est l’exception au lieu d’être la règle, l’administration des postes ayant eu l’habileté de ne point contraindre le public à l’employer. Comme la poste n’apporterait les journaux du matin que dans la soirée à Liverpool, à Manchester, à Birmingham, où les négocians tiennent beaucoup à les recevoir avant déjeuner, les maisons de commission expédient les journaux par les convois du matin, et les font distribuer à domicile par leurs employés. Le chemin de fer transporte de Londres à Manchester pour 2 shillings (2 francs 50 centimes) cent livres pesant, qui représentent dix-sept cents numéros des feuilles hebdomadaires et cinq cents numéros du Times; les courtiers peuvent donc prendre le transport et la distribution à leur charge, sans être obligés d’augmenter considérablement le prix de l’abonnement. Dans les petites villes, où le nombre des personnes qui prennent des journaux est moins grand, il n’en est plus ainsi, et les courtiers sont souvent obligés d’ajouter un penny ou dix centimes au prix de chaque numéro, ce qui élève l’abonnement d’un sixième.

Le Times possède un brevet d’imprimeur, et il cède aux courtiers au prix uniforme de 40 centimes ses numéros, qui sont côtés à 50. Les autres journaux sont imprimés et publiés sous la responsabilité d’un imprimeur patenté qui prend le nom de publisher, ou, comme nous dirions en français, d’éditeur ou de gérant du journal. Le publisher n’a d’autres fonctions que d’être responsable aux yeux de la loi, de compte à demi avec l’editor ou rédacteur en chef. Outre la location de son brevet, il trouve la rémunération du risque qu’il court dans une retenue sur la remise faite aux courtiers, qui ne traitent qu’avec lui. Le journal passe au publisher chaque quire ou rouleau de vingt-sept exemplaires aux trois quarts du prix fort de 50 centimes. Le publisher gagne donc un quart sur chaque numéro vendu isolément dans les bureaux du journal, il gagne un exemplaire par quire sur les numéros vendus aux libraires, aux papetiers, aux petits courtiers qui en prennent moins de vingt-sept et auxquels il ne fait pas la remise entière; enfin il prélève une légère retenue sur les grands courtiers qui prennent plusieurs rouleaux. Ceux-ci lui font à leur tour une remise sur les demandes d’abonnement qui arrivent directement à l’administration et qu’il leur renvoie. En somme, chaque numéro est passé au publisher à raison de 3 pence trois quarts, il est cédé aux courtiers aux environs de 4 pence, et il est vendu 5 pence au public. La remise de 20 à 25 pour 100 faite aux courtiers ne paraîtra pas trop considérable, si l’on songe que ceux-ci prennent à leur charge toutes les non-valeurs, qu’ils font l’avance de toutes les sommes représentées par la vente des numéros, puisqu’ils ne rentrent dans leurs fonds qu’à la fin du trimestre; qu’en outre ils sont obligés de faire prendre à leurs frais le journal aux bureaux, de le plier, de le mettre sous bande, de faire écrire ou imprimer l’adresse que porte la bande, et de faire transporter le journal ainsi préparé à la poste ou au chemin de fer.