Page:Revue des Deux Mondes - 1853 - tome 1.djvu/1034

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

destination paraît avoir été religieuse autant au moins que funéraire. En effet, on trouve des autels dans un grand nombre de ces tertres, et, dans quelques-uns seulement, des ossemens humains.

Dans la collection de M. Davies est un crâne américain provenant d’un grand tertre qui s’élevait sur une hauteur, à quelques milles de Chilicothe, et semblait de là dominer tout le pays. C’était probablement le tombeau d’un chef célèbre de ces populations inconnues. Ce crâne offre, selon M. Morton, qui était bon juge en cette matière, le type le plus parfait de la race américaine.

Outre les pipes et les autels, M. Davies a rassemblé dans sa collection, provenant de la même origine, beaucoup d’objets très intéressans. D’abord on y voit des instrumens de combat, des pointes de javelot ou de lance en silex, comme on en rencontre dans beaucoup de pays. Ce qui est plus particulier à l’Amérique, ce sont de pareilles pointes de lance en quartz laiteux ou en cristal de roche. Les unes et les autres semblent une imitation d’un modèle fourni par la nature dans les dents fossiles des requins. Les tertres fournissent en grand nombre ces dents, aussi bien que celles de l’ours et de l’alligator : elles paraissent avoir été employées pour former des espèces de colliers, comme certaines tribus sauvages le pratiquent encore aujourd’hui. Quelques outils semblent indiquer chez le peuple qui les employait un certain degré d’habileté. Les ciseaux en pierre ont été polis avec du sable ; une espèce de roue qui présente une rainure à l’extérieur paraît avoir reçu dans cette rainure un fil peut-être métallique, au moyen duquel on pouvait faire tourner une vrille ; des fils métalliques étaient aussi employés à rajuster les objets en pierre fracturés ; des plaques percées de trous, dont l’intérieur va s’évasant d’un côté à l’autre, servaient peut-être de filière. Des poteries de formes variées et parfois assez gracieuses, quelques-unes présentant à leur surface des festons et des ornemens, sont, comme les pipes, très supérieures à ce que fabriquent en ce genre les races indigènes qui ont vécu depuis dans les mêmes contrées. On a trouvé aussi des coquilles entassées en monceaux, de manière à donner l’idée qu’elles servaient peut-être de monnaie. On sait qu’il en est ainsi dans l’Inde, et que le même usage existait chez certains peuples sauvages de l’Amérique septentrionale.

Il n’y a dans tout cela ni or ni fer. L’emploi du fer est postérieur à celui du cuivre. Les armes des héros d’Homère sont en bronze, et l’on n’a découvert jusqu’ici que bien peu d’objets en fer dans les tombeaux égyptiens. L’ordre des âges fabuleux de l’humanité est l’ordre historique de la découverte des métaux d’après lequel les âges ont été désignés. L’or est le premier : on rencontre ce métal à la surface de la terre ou dans le lit des fleuves. L’argent est plus enfoui, et son exploitation est difficile ; aussi l’hiéroglyphe égyptien qui désigne