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on déplore la disparition de l’état social du moyen-âge? En ce cas, ce n’est pas à nous, c’est à l’église même qu’il faut s’en prendre. C’est elle qui a travaillé long-temps, péniblement, bien des siècles et bien des jours, à tirer l’Europe de l’état complexe et grossier du moyen-âge. Apparemment elle ne travaillait pas à l’aventure, et elle savait ce qu’elle faisait, elle ne se dissimulait pas les dangers qu’entraîne à sa suite une civilisation développée; mais elle avait assez de confiance en elle-même pour ne les pas craindre. Elle savait que les lumières ont leurs périls, et elle n’a pas hésité pourtant à les répandre; elle savait qu’il n’est pas toujours salutaire à l’homme de beaucoup connaître, elle ne lui en a pas moins beaucoup appris. Elle n’a pas imité ces maîtres jaloux qui retardent l’éducation de leur élève pour garder plus long-temps une autorité plus facile. Eût-elle fait ce calcul, elle n’aurait pu l’exécuter. La religion chrétienne civilisait le monde par sa nature, rien n’aurait pu l’en empêcher. Si on veut trouver quelque part des religions qui compriment l’intelligence et font languir l’activité humaine, des castes sacerdotales qui fondent leur empire sur l’ignorance prolongée des populations, ce n’est pas à l’église qu’il faut s’adresser. L’erreur,

En esclaves fertile,
Pour un que l’on cherchait, en eût présenté mille.
Dans une longue enfance ils l’auraient fait vieillir.


Chargée de la tutelle du monde nouveau, l’église a fait grandir son pupille au risque qu’il s’émancipât, et, malgré les écarts des sociétés chrétiennes, nous ne conviendrons jamais que cette mère généreuse ait eu trop à rougir des enfans qu’elle a nourris.

Concluons, il en est temps. Nous avons essayé de faire voir que les mœurs du moyen-âge n’étaient l’état ni idéal ni même habituel des sociétés catholiques. Les premiers siècles de l’église nous ont offert le tableau d’une société parfaitement différente de celle du moyen-âge, et pourtant tout animée de l’esprit chrétien : ils nous ont fait voir en même temps de quelles circonstances violentes était sorti l’état primitif des nations modernes, et de quels élémens multiples et variés il était le résultat informe et transitoire. Si nous avons réussi à faire comprendre notre pensée sous cette double face, notre démonstration peut passer pour complète, et nous avons le droit d’affirmer qu’il n’y a entre le catholicisme et le moyen-âge aucune espèce de solidarité à établir. Dès-lors nous cherchons vainement quel est le sentiment qui porte tant d’écrivains catholiques à autoriser par leur langage, par leurs affirmations systématiques et par leurs prédilections involontaires, une confusion que rien ne légitime. Nous craignons qu’ils ne cèdent à une susceptibilité honorable, mais excessive, à une sorte de point d’honneur qui serait plutôt militaire que religieux. Parce qu’au