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une prévoyance attentive et un service exact parvenaient à rendre nos communications plus promptes et moins dispendieuses, ce qui est tout-à-fait possible. La France ramènerait ainsi vers elle un peu de ce courant établi aujourd’hui par l’Angleterre vers l’Amérique du Sud, vers le Brésil comme vers les côtes de l’Océan Pacifique. C’est à une ville comme Bordeaux qu’il appartient de prendre l’initiative d’une telle entreprise, sans exclure d’ailleurs les autres villes du littoral de l’Océan.

Si Paris n’a point ces mêmes avantages d’un contact immédiat avec la mer, s’il ne peut ambitionner le rôle d’une grande métropole maritime, il peut trouver dans d’autres moyens, dans d’autres combinaisons, au point de vue du commerce même, des élémens d’agrandissement. Un de ces moyens, à coup sûr, est la création de docks récemment décrétée par le gouvernement. On sait quelle est la destination des docks. Ce sont de vastes entrepôts où restent déposées toutes les marchandises jusqu’au moment où elles entrent dans la consommation. Au moyen d’un récépissé ou warrant qui sert de titre de propriété en même temps qu’il constate la nature et la valeur de l’objet de commerce, et qui a cours comme un effet public, les marchandises peuvent être négociées sans déplacement et restent comme la garantie du warrant en circulation. On sait aussi quel rôle joue dans la vie commerciale de Londres le système des docks et du warrant. L’Angleterre est toujours le puissant atelier d’où sortent ces grandes simplifications des opérations du négoce. La Seine n’est point la Tamise sans doute, et Paris ne peut rivaliser avec Londres ; mais, par sa position, il peut devenir une sorte d’entrepôt dans le midi de l’Europe. Dt’jà en 1848 on avait essayé la réalisation de ce système ; seulement cet essai portait Fempreinte de l’époque : c’était comme un secours offert au commerce en détresse encore plus que le ressort actif et vigoureux d’Un mouvement normal. D’ailleurs, le moment n’était peut-être point fort opportun pour des opérations où le crédit et la confiance publique ont leur place. La question est de savoir ce que deviendra aujourd’hui cette idée dans des conditions meilleures. C’est une compagnie qui est concessionnaire du privilège de cet établissement. Le dock parisien doit s’élever sur la place de l’Europe, à proximité du chemin du Havre ; par la ligne de ceinture, il communique avec toutes les voies de fer qui conduisent à Paris les marchandises ; par des entrepôts secondaires, il est à portée des voies de navigation ; il devient comme un centre où peuvent affluer sans entraves les objets de dépôt. Tout se réunit pour rendre cette entreprise sérieuse ; on ne saurait méconnaître l’impulsion nouvelle qu’elle peut donner aux affaires et le changement qu’elle peut introduire dans les habitudes du négoce de Paris. C’est une sorte de mobilisation qui supprime pour le commerce beaucoup de frais intérieurs et individuels, et qui a pour résultat de multiplier les transactions en les facilitant. Ainsi la vie commerciale de Paris peut trouver un ressort nouveau dans cette création. À travers tous les symptômes de notre situation, il y a une chose à considérer : c’est la quantité d’élémens qui s’offrent à Factivité publique, c’est le nombre de spéculations et d’entreprises auxquelles s’attache à la fois l’esprit d’industrie affranchi des plus prochains périls. Travaux publics, constructions de tout genre, chemins de fer, docks, voies de communication à travers l’Océan, crédit foncier, tout cela a sa place et sa significa-