Page:Revue des Deux Mondes - 1852 - tome 16.djvu/390

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
384
REVUE DES DEUX MONDES.

grandissement du Zollverein avant que la Prusse se fut entendue avec l’Autriche. Non contens du résultat de cette première conférence à Darmstadt, les états coalisés en tinrent une seconde, dans laquelle ils stipulaient qu’aucun gouvernement membre du Zollverein ne pourrait conclure un traité de douane avec un autre état sans la permission de tous les autres membres. Si jusqu’à la fin de 1853 aucun de ces états n’avait conclu un traité de ce genre, ils devaient former une union douanière entre eux. Le gouvernement de Bade, se rappelant probablement les grands services que la Prusse lui avait rendus lors de la dernière insurrection, ne souscrivit pas à cette clause du traité. Dans une troisième conférence enfin, on convint de faire à l’Autriche une nouvelle proposition au sujet de l’article secret du projet devienne, dans lequel l’Autriche avait promis de garantir aux autres états leurs revenus, si la demande en était faite avant le 30 janvier 1853 ; les autres gouvernemens s’engagèrent aussi à ne pas traiter avec la Prusse avant le 1er  janvier 1853, à moins que celle-ci ne se fût d’abord entendue avec l’Autriche. Le cabinet de Bade resta encore étranger à cette dernière clause du traité de Darmstadt.

La nouvelle de ce traité fit une impression immense dans toute l’Allemagne. Dans le nord, on était particulièrement surpris de la conduite de la Saxe, pour laquelle le Zollverein avait eu des résultats si avantageux. On parlait d’intérêts dynastiques qui seuls avaient pu faire oublier les intérêts matériels du pays. Il fut question d’établir à Berlin une grande foire pour faire concurrence à celle de Leipzig. Le ministère de M. de Manteuffel fut assailli bientôt par les propositions les plus aventureuses : les libres échangistes demandaient que la Prusse se séparât immédiatement du Zollverein, et qu’elle prît des mesures décisives pour la liberté du commerce. M. de Manteuffel se contenta de maintenir son programme : — reconstituer d’abord l’union et traiter ensuite seulement avec l’Autriche. Cette ferme attitude était digne de l’homme qui avait été le plus énergique adversaire du prince Schwarzenberg. Issu d’une ancienne famille noble de la Basse-Lusace, le baron Otto de Manteuffel était entré, jeune encore, au service de l’état, et son avancement dans la carrière administrative avait été rapide. Au mois de juin 1842, M. de Manteuffel fut nommé vice-président du gouvernement de Stettin. Plus tard, il devint conseiller supérieur privé, et, au printemps de l’année 1848, directeur de la deuxième division au ministère de l’intérieur. À la diète de Berlin, en 1847, M. de Manteuffel se signala par sa courageuse défense du pouvoir royal contre les empiétemens du principe représentatif. Lorsqu’on 1848 on se fut enfin décidé à prendre des mesures contre les tendances révolutionnaires, M. de Manteuffel fut nommé ministre de l’intérieur dans le cabinet présidé par M. de Brandebourg. À l’occasion de la dissolution du parlement, M. de Manteuffel montra encore un