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LE ZOLLVEREIN ET L’UNION AUSTRO-ALLEMANDE.

triche avait 35,402,734 habitans ; le Zollverein en comptait 26,048,970. En 1846, d’après les tables statistiques, l’Autriche en comptait 37,443,033, le Zollverein 29,460,816. Or, en comparant ensemble ces quantités numériques, on remarquera qu’en Autriche la population a augmenté de 5 huitièmes pour 100, et dans les états du Zollverein de 10 neuvièmes pour 100. Supposez qu’après 1858 l’accroissement des deux populations continue à se faire dans les mêmes proportions, la part pour laquelle l’Autriche contribuerait à la recette générale augmenterait de 6 centièmes pour 100, tandis que, pour le Zollverein, cette augmentation serait de 12 centièmes pour 100 ; et comme cette circonstance n’entrerait nullement en considération pour le partage des revenus, l’Autriche percevrait des droits de douane d’année en année plus forts, malgré une augmentation plus lente de la population, tandis que pour le Zollverein le contraire aurait lieu malgré l’accroissement plus rapide du même élément. À la vérité, il ne serait pas impossible que ce fût l’Autriche qui se trouvât dans une position désavantageuse, si le mouvement de la population avait lieu dans une proportion différente ; mais ce qui est incontestable, c’est que, dans l’un de ces cas comme dans l’autre, le projet de l’Autriche manque absolument d’une base équitable pour la répartition des revenus.

Il convient d’examiner encore si le plan d’une union austro-allemande ne présente pas par lui-même des inconvéniens trop graves pour que la réalisation soit dans l’intérêt des deux parties.

L’importation des produits bruts et des produits de l’industrie de l’Autriche entraverait évidemment la vente des produits des pays du Zollverein. Des contrées qui n’ont rien à offrir peuvent difficilement acheter, et certains pays de l’Autriche, encore à demi barbares, ont plus qu’il ne faut des marchandises que cet empire produit lui-même. Que l’on considère maintenant la cherté du transport du nord de l’Allemagne aux frontières de la Turquie, et l’on ne pourra nier que l’exportation vers les pays autrichiens dont nous venons de parler ne présente de grandes difficultés.

Le seul grand port de mer que possède l’Autriche est celui de Trieste, dont l’importance consiste principalement dans ses rapports avec l’Orient. L’industrie des états du nord se porte au contraire sur le commerce transatlantique. Or il pourrait se faire qu’une puissance jalouse bloquât le port de Trieste, et l’Autriche a par conséquent un grand intérêt à ouvrir aux produits de son industrie une entrée libre dans d’autres ports. Quant à la Bohême, M. de Bruck a déjà reconnu que l’écoulement le plus facile des produits de ce pays, essentiellement industriel, doit se faire par l’Elbe, qui se jette dans la Mer du Nord. Ce sont là autant de nouveaux motifs pour l’Autriche de demander son admission dans le Zollverein ; mais l’union douanière allemande aurait-elle également intérêt à cette admission ? Cela est douteux.