pendant quarante années, dans son pays, d’une gloire qui n’a jamais décru, et que les passions politiques n’ont jamais essayé de mordre. Si cela fait honneur à l’homme, disons-le, cela fait aussi honneur au peuple qui sait avoir une telle religion de ses illustrations. Quant à nous, que faisons-nous souvent des hommes qui sont la force et l’éclat de notre patrie ? Souvenez-vous de cette comédie de l’esprit de parti qui faisait alternativement gagner ou perdre la bataille de Toulouse par le maréchal Soult, suivant que le vieux capitaine était au ministère ou hors du pouvoir ! Quelle gloire vivante est sûre de rester intacte quarante ans ? Il semble que ce soit un besoin pour nous de briser périodiquement nos admirations, et que nous ne puissions trouver un milieu raisonnable, juste et patriotique entre le fanatisme et l’oubli ou l’injure ; et, si ces inconstances, si ces caprices du patriotisme sont si fréquens, n’en faut-il point encore rejeter la faute sur l’action corruptrice des révolutions ?
Ce sont là au surplus des faits et des impressions qui dominent le cours ordinaire de notre vie publique actuelle. Pour le moment, nous le disions, le voyage du prince-président est l’unique préoccupation de tous les jours. Les incidens d’une autre nature auraient peu de prix, s’il n’y avait quelques mesures qui touchent à l’enseignement dans ses branches diverses. Disons un mot de l’institut agronomique de Versailles. Cette création, due à l’année 1848, était-elle réellement féconde, comme l’ont pensé et le pensent encore quelques esprits ? était-ce une institution inutile ? Il y a aujourd’hui en faveur de cette dernière opinion la décision du gouvernement, qui vient de supprimer l’institut de Versailles. Ce qu’on peut dire de mieux, c’est que c’était un établissement formé avec soin, qui réunissait de savans et habiles professeurs. Par malheur, en France, qu’il s’agisse de commerce ou de science, de littérature ou de travail agricole, la première chose dont nous nous occupons instantanément, c’est d’ouvrir des écoles et de distribuer des diplômes. Le plus essentiel n’est point là pourtant. En fait d’agriculture surtout, il y a un grand maître, qui est la pratique ; c’est ce maître qu’il faut toujours écouter et consulter. Il y a sans doute des connaissances qu’il est utile de multiplier et de propager ; mais, dans son essence, l’agriculture n’est point une science qui puisse avoir ses bacheliers et ses docteurs, et dèsrlors pourquoi une faculté ? Le gouvernement, il nous semble, a un moyen plus assuré de stimuler et de favoriser le développement du travail agricole : c’est de lui donner l’ordre et la paix, d’étendre les relations du pays, de compléter les voies de communication, d’adoucir les charges qui pèsent sur la terre et de laisser à l’intelligence individuelle le soin de faire son œuvre au sein de ces conditions plus faciles.
Il n’en est pas, on le comprend, de l’enseignement appliqué à l’agriculture comme de l’enseignement littéraire. Ici l’organisation, les soins attentifs, les leçons permanentes, l’ordre des études ne sauraient être de trop. Ce ne sont plus des hommes spéciaux qu’il s’agit de former, ce sont des hommes dans toute l’étendue et l’excellence du mot. On sait à quel point on se préoccupe aujourd’hui de toutes ces matières d’éducation publique. Cette sollicitude s’explique par le besoin de recomposer en quelque sorte des générations meilleures, plus assurées dans leur foi et dans le sentiment des grandes lois de la vie humaine. Toutes les tentatives, toutes les réformes jetées dans la discussion