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ceux que l’invasion de la race européenne accomplit chaque jour sur le sol des États-Unis. La température y est plus rigoureuse, la terre moins fertile, la législation moins libérale, le régime économique moins favorable à la culture et à la vente des produits. Les possessions anglaises de l’Amérique du Nord peuvent cependant s’enorgueillir du développement qu’elles ont acquis depuis vingt ans. Le Saint-Laurent et les lacs ont vu s’établir sur leurs rives, naguère désertes, des populations nombreuses qui se distinguent par leur esprit d’entreprise. Des villes florissantes s’élèvent sur l’emplacement d’épaisses forêts récemment abattues par les pionniers. En 1816, la ville de Toronto, sur le lac Ontario, se composait de soixante-seize pauvres huttes en bois et présentait l’aspect d’un simple campement ; elle contient actuellement plus de 15,000 âmes, et elle est devenue le chef-lieu d’un district considérable. Il en sera bientôt de même d’Hamilton, de Goderich, et des autres points par lesquels l’immigration pénètre pas à pas dans les régions encore inexplorées, et va peupler les vastes territoires (Huron tracts) possédés par la compagnie du Canada.

Cette compagnie a commencé ses opérations, entre les lacs Huron et Ontario, dans les derniers mois de 1829 ; elle a d’abord percé des chemins, puis elle a concédé des lots de terre au prix d’un dollar et demi l’acre, dont elle n’exigeait pas le paiement immédiat. Les ouvriers qui furent employés aux travaux des routes devinrent les premiers colons, et ils poussèrent les défrichemens avec vigueur. La compagnie modifia à plusieurs reprises les clauses primitives des contrats ; mais elle est aujourd’hui revenue au système des concessions à crédit, c’est-à-dire qu’elle n’exige du colon que le versement d’une rente qui, s’accroissant par degrés, doit, à la douzième année, atteindre 16 livres sterling et demie par 100 acres. À l’expiration de ce terme, le colon est reconnu propriétaire absolu du sol. Le système adopté s’accorde parfaitement avec les besoins de l’émigration, car il rend la propriété accessible à ceux-là mêmes qui ne possèdent aucun capital, et il prélève successivement le prix de la terre sur les produits du travail. La compagnie peut exploiter un espace d’un million d’acres ; elle se trouve donc en mesure de recevoir pendant de longues années les colons d’Europe et de leur offrir, à des conditions avantageuses, le travail et la propriété. Dès 1840, elle comptait sur son territoire 6,000 habitans, dont le capital, acquis par la culture et par l’élève du bétail, dépassait 6 millions de francs. Depuis douze ans, les progrès ont encore été plus rapides ; avant la fin du siècle, la civilisation de l’ancien monde se sera complètement emparée des déserts qui s’étendent entre le lac Érié et le lac Ontario.

L’émigration qui se dirige vers les colonies anglaises du cap de Bonne-Espérance et de l’Australie présente un caractère particulier : elle s’effectue en grande partie sous la direction du gouvernement et aux frais du trésor public. De 1847 à 1850, la commission anglaise a expédié plus de 200 navires chargés de 50,000 émigrans, et elle a dépensé pour ce transport plus de 600,000 livres sterl. (environ 15 millions de fr.). Sur cette somme, les passagers n’ont fourni que le huitième ; le reste provient soit d’allocations faites par le parlement, soit de subventions envoyées par la colonie du Cap, soit enfin du produit de la vente des terres en Australie ; cette dernière contribution est