qu’ils possèdent de plus attrayant. A l’Opéra, le succès de Moïse se consolide et se propage comme s’il s’agissait d’un chef-d’œuvre nouveau; à l’Opéra-Comique, on attend un ouvrage de M. Auber. dans lequel débutera Mlle Caroline Duprez, et le troisième théâtre lyrique, qui paraît voué à la musique de M. Adolphe Adam, a suspendu les triomphales représentations du Postillon de Lonjumeau et de Si j’êtais Roi, pour reprendre la Perle du Brésil de M. F. David, partition agréable qui ne résout pas le problème de savoir si l’auteur du Désert est réellement un compositeur dramatique. Quoi qu’i! en soit, le Théâtre-Lyrique a donné la semaine dernière un nouvel opéra en deux actes, Guillery le trompette, dont la musique est l’œuvre d’un jeune compositeur italien, M. Sarmiento. Des longueurs interminables, de nombreuses réminiscences et beaucoup de bruit sont les qualités les plus saillantes que nous ayons remarquées dans Guillery le trompette.
Le Théâtre-Italien a fait sa réouverture le 16 novembre par l’Otello de Rossini. Le nouveau directeur, M. Corti, qui a succédé brusquement à M. Lumley, n’a pas eu le temps encore d’aviser à toutes les difficultés de son entreprise, qui sont bien grandes, si ce n’est presque insurmontables. L’établissement d’un Opéra-Italien à Paris, qui remonte au siècle de Louis XIV, intéresse particulièrement les classes élevées de la société qui ont des loisirs et qui recherchent les choses délicates de l’esprit. Tant que la musique française a été dans l’enfance ou dans la période de son premier développement, les opéras et les chanteurs de l’Italie ont pu offrir un exemple salutaire dont le goût national a fait son profit; mais, depuis que la France a pris rang parmi les nations qui cultivent avec succès l’art musical, l’existence d’un Théâtre-Italien à Paris est devenue de plus en plus difficile. On peut remarquer trois périodes brillantes dans l’histoire de l’Opéra-Italien depuis le commencement de ce siècle : la période de l’empire, celle de la restauration, et les dix-huit années de la monarchie de juillet. Ces trois époques correspondent à trois phases caractéristiques de l’histoire de l’école italienne.
Pendant les quinze années de l’ère impériale, le Théâtre-Italien a vécu des chefs-d’œuvre des derniers maîtres du XVIIIe siècle, Mozart, Cimarosa, Paisiello et leurs imitateurs, Fioravanti, Zingarelli, etc. Le génie de Rossini a rempli largement le règne de la restauration, qui est une des époques les plus florissantes de l’histoire de l’art; Rossini, Bellini et Donizetti ont défrayé les dix-huit années de paix et de prospérité qui ont été interrompues par la catastrophe de février 1848. Depuis cette révolution fatale, qui a bouleversé la France et l’Europe, le Théâtre-Italien n’a pu retrouver le public d’élite qui lui a procuré une si longue prospérité. On peut sans doute espérer que, sous un gouvernement comme celui qui vient de s’inaugurer en France, les classes qui ont des loisirs reprendront leurs habitudes, et que l’Opéra-Italien retrouvera aussi la place qu’il a occupée dans la vie parisienne; mais il faudrait pour cela que l’Italie eût à nous offrir des compositeurs et des virtuoses dont il semble, au contraire, qu’elle est dépourvue. En effet, cet admirable pays, que la nature a traité avec tant de munificence, en est arrivé à une de ces époques critiques dont son histoire est remplie. Depuis que Rossini s’est imposé silence, depuis surtout la mort prématurée de Bellini et de Donizetti, il ne s’est produit dans la patrie des Scarlatti, des Pergolèse, des Jomelli, des