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était devenu auteur de nouvelles à la main, c’est-à-dire que, moyennant salaire, il adressait par écrit aux gens le récit des événemens du jour : c’était alors une profession fort répandue. A partir du 25 septembre, le nom de Butter figure régulièrement et en première ligne sur chaque numéro des Weekly News, mais il est toujours joint au nom de quelqu’un des libraires dont nous avons parlé. Il est probable que les libraires faisaient les frais de la publication, et que Butter était chargé de la rédiger pour leur compte. Par un changement qui paraît aujourd’hui tout simple et qui était pourtant une révolution, Butter faisait imprimer ce qu’il s’était jusque-là borné à écrire; il mettait à la portée de tout le monde ce qu’il avait adressé à un petit nombre de personnes. Il est à remarquer qu’à partir du jour où le nom de Butter figure sur les Weekly News, les mots traduit du hollandais disparaissent du titre, ce qui constate l’originalité de la rédaction, et chaque exemplaire qui paraît de semaine en semaine porte, outre la date de sa publication, un numéro d’ordre, ce qui met hors de doute la périodicité du recueil.

Les Weekly News étaient donc un vrai journal dans le sens où nous prenons aujourd’hui ce mot. Ce premier-né de la presse anglaise était loin d’avoir les dimensions formidables des journaux actuels. Un seul numéro du Times ou du Chronicle contient plus de matière que les Weekly News n’en donnaient en une année. C’était une petite feuille in-quarto, imprimée sur un papier très grossier, qui contenait à la file les uns des autres et sans aucune liaison les événemens importans ou singuliers arrivés sur le continent : une victoire du comte de Mansfeld en Allemagne, un sacrilège à Bologne, un assassinat ou un empoisonnement à Venise, un grand incendie à Paris. Il n’est jamais fait la moindre allusion à ce qui se passe en Angleterre, et les événemens du continent sont l’objet d’un simple récit, sans aucune réflexion. Sous ce rapport, les Weekly News ne diffèrent en rien des feuilles volantes qui les avaient précédées; mais c’était déjà une grande nouveauté que cet intérêt qui s’attachait aux nouvelles du dehors. Un siècle plus tôt, ce que nous appelons la politique extérieure était l’affaire des rois uniquement et de leurs ministres; les peuples y demeuraient absolument étrangers, et nul ne prenait souci en France de ce qui pouvait se passer en Angleterre ou en Espagne. Les guerres de religion mirent fin à cette indifférence mutuelle; il y eut désormais, à part les rivalités des souverains, un intérêt commun entre les nations. La querelle qui se vidait par les armes en Hollande ou en Allemagne était la querelle de tous les protestans et de tous les catholiques : chaque bataille, chaque prise de ville mettait une moitié de l’Europe dans la joie et l’autre moitié dans la douleur. Les nouvelles, même des pays les plus lointains, furent dès-lors pour toutes les classes l’objet d’une