le courant ou qu’il l’ait simplement détourné, la diminution des résultats officiellement constatés est un fait acquis. Cette décroissance a été d’un septième en trois années, ou d’environ 4,000 kilogrammes.
L’exploitation des terrains aurifères n’a pas en Sibérie le caractère démocratique qui distingue de nos jours le régime des extractions et des lavages dans les placers de la Californie et de l’Australie. Là, le premier manœuvre venu, pourvu qu’il soit muni d’une pioche, d’une sébille ou bâtée, d’un berceau et d’une provision de vivres, peut, sans autre capital, planter sa tente sur quelques mètres carrés de terrain et fouiller le sol jusqu’à ce qu’il ait trouvé fortune. Moyennant une patente, qui lui coûte 60 shillings en Australie, et en payant, en Californie, un droit de 20 dollars par année, il se place partout où la chance lui paraît favorable. Ce n’est pas l’état qui limite le terrain qu’il occupe, c’est la république elle-même des mineurs, réunis le long d’un ruisseau ou au pied d’une colline, qui ne permet à aucun membre de cette communauté improvisée et accidentelle de s’approprier un espace plus étendu que celui que peut embrasser le travail de ses mains. Le mineur, ne possédant rien et ne risquant aucune mise de fonds, est dispensé de faire un calcul de profits et de pertes. Si le travail auquel il se livre ne répond pas à ses espérances, il change de lieu et souvent d’occupation. Dans tous les cas, l’impôt, ne portant pas sur le capital et demeurant très modéré, se paie aisément : quelques journées de travail en font l’affaire ; le reste de l’année avec ses bonnes et ses mauvaises chances appartient en propre à l’ouvrier.
Il n’en est pas ainsi dans les régions de l’Altaï, où les formes aristocratiques de la grande industrie, soit par la volonté de l’état, soit par le fait des circonstances, ont prévalu dès les premiers pas de l’exploitation. Aux termes des règlemens impériaux, les concessions ne sont obtenues qu’à la suite d’une demande expresse et pour un terme de douze années. Le lot assigné à chaque particulier n’excède jamais une largeur de 100 sagènes (environ 250 mètres), sur une longueur de 5 werstes au maximum, soit de 5,335 mètres. Cependant le même entrepreneur peut posséder plusieurs lots, pourvu qu’une distance de 3 werstes au moins les sépare. Ces entrepreneurs engagent un certain nombre d’ouvriers, auxquels ils fournissent les machines ainsi que les outils, qu’ils nourrissent et qui reçoivent en outre des salaires très élevés. Toutes ces obligations entraînent l’avance d’un capital considérable, et lorsqu’à la chance d’une production peu abondante ou quelquefois nulle vient s’ajouter la perspective d’un prélèvement exorbitant au profit de l’état sur le produit brut, doit-on s’étonner que les membres de cette féodalité improvisée pour un temps sur les placers de Sibérie aient jugé prudent de restreindre ou de dissimuler l’étendue de leurs entreprises ?