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DE LA PRODUCTION


ET


DE LA DEMONETISATION DE L'OR.




Depuis le commencement du siècle, l’or avait constamment joui en Europe d’une faveur marquée par rapport à l’argent. La valeur commerciale de ce métal demeurait en moyenne supérieure d’environ 1 pour 100 à sa valeur légale. L’or ne circulait plus qu’en Angleterre à l’état de monnaie ; dans toutes les contrées qui ont un double étalon monétaire, la monnaie d’or, à peine frappée, redevenait marchandise et tendait à sortir de la circulation. Des trésors inattendus se révélaient sans que l’exploitation de ces gisemens aurifères parvînt à rétablir l’équilibre entre les valeurs métalliques et à saturer le marché. La civilisation, en se développant dans les temps historiques, ne faisait que convertir en réalités les légendes des temps fabuleux. L’or, en raison de l’importance et de la constance de sa valeur, semblait devoir être à perpétuité le symbole et l’agent principal de la richesse.

Dans ce courant que suivaient les métaux précieux, un temps d’arrêt ou plutôt une déviation se manifeste aujourd’hui. L’or paraît appelé à déchoir de sa suprématie monétaire. Cette souveraineté a été d’abord battue en brèche, comme tant d’autres, par une sorte d’insurrection de la peur. Il y a dix ans, l’on redoutait outre mesure la dépréciation de l’argent ; c’est la dépréciation de l’or qui fait depuis dix-huit mois les frais de la panique. Quelques-uns des peuples qui cherchaient auparavant à l’attirer ou à le retenir dans leur circulation au prix de grands sacrifices ont montré une impatience fébrile de l’en expulser.