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son nom, l’on décide qu’elles se célébreront à Quito, qu’elles dureront huit jours par année, et que la madone, conduite processionnellement jusqu’à la cathédrale de la ville, y restera exposée pendant les huit jours désignés pour la fête aux hommages des fidèles. Ce n’est pas tout. Il fallait que le cortège déployât une pompe, une magnificence inaccoutumée. Pour atteindre ce but, on songea à la garnison de la ville, à son attirail militaire et aux moyens qu’elle tenait à sa disposition ; mais une permission spéciale du roi devenait nécessaire, la fête du Corpus ayant eu seule jusqu’à ce jour le privilège d’augmenter son éclat du concours de la force armée. Une requête fut donc adressée à l’Escurial par les habitans de Quito. La concession royale fut immédiate et complète : non-seulement le roi catholique accorda aux Quiteños ce qu’ils sollicitaient, mais il conféra à la vierge de Guapulo le grade de capitaine-général de ses armées. Ce titre, qu’elle partageait avec le vice-roi, lui donnait la faculté de jouir des honneurs, des privilèges et du traitement attachés à son grade durant les huit jours qu’elle passerait à Quito. A l’époque des fêtes, la vierge, qui se trouvait naturellement de service, portait l’uniforme de capitaine-général ; elle se montrait en public vêtue de l’habit chamarré, les talons battus par une rapière, le front ombragé d’un tricorne galonné d’or avec la cocarde aux couleurs espagnoles. L’enfant Jésus participait aux honneurs décernés à sa mère : il revêtait à peu près le même uniforme, et, la tête couverte du chapeau militaire, il se tenait à ses côtés, l’épée à la main, durant la procession, remplissant l’office de son aide-de-camp.

Je prenais volontiers le couvent de San-Francisco pour but de mes promenades matinales ; j’y cherchais un refuge contre les agitations de la ville et un abri contre les tropicales ardeurs du soleil. Que d’heures charmantes j’ai passées dans ce dédale de galeries, dans ces immenses cloîtres qui recèlent des ombrages remplis de fraîcheur, de parfums et de murmures ! Ce qui m’attirait surtout au couvent de San-Francisco, c’était une des enceintes intérieures qui conserve presque intact le caractère de son ancienne magnificence. Deux rangées de galeries superposées encadrent cette cour transformée en jardin anglais et dominée par les deux lourds clochers jumeaux de l’église. L’intérieur du cloître est lambrissé de carreaux de faïence ; les plus ingénieuses arabesques y entrelacent leurs vives couleurs, et les plafonds se composent d’une infinité de compartimens séparés par des moulures ; le tout est agencé avec un goût parfait. Une série de tableaux empruntés à la vie de saint François décore la partie supérieure des galeries. Une grille de bois tourné ferme les arcades de la partie inférieure et met le jardin à l’abri des déprédations des jeunes novices et du vandalisme des employés subalternes. — Au centre de cette émeraude de verdure, s’élance de son chandelier de bronze à triple étage un jet d’eau qui, fier