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comme la retraite se trouvent toujours assurées par une ligne de postes établis dans les meilleures conditions de défense et de sécurité, où tout enfin semble prévu, y compris la défaite. MM. Azéma de Montgiavier, de Blinière, Judas, Prévot, Tripier, Texier, ont publié sur les monumens romains et les monumens tumulaires du Sersou, les antiquités de Cherchell, d’Orléansville et sur une foule de points particuliers, des mémoires qui jettent un grand jour sur l’archéologie de l’Afrique et sur son histoire. Les notes qui ont servi à la rédaction de ces mémoires ont été prises la plupart pendant des expéditions militaires et entre deux combats, car l’archéologie en Afrique est la fille de la guerre ; chaque nouvelle expédition a marqué pour elle un progrès nouveau : elle a figuré plus d’une fois dans les rapports des généraux, et nous indiquerons, entre autres, un bulletin du brave général Négrier à la suite d’une brillante expédition sur Thebsa, bulletin qui contient de cette ville antique une description remarquable, simple, large et sévère comme les ruines romaines elles-mêmes. Officiers et soldats, chacun a compris l’importance de ces recherches ; aux travaux exécutés dans un intérêt public, on a fait par des fouilles archéologiques d’attachantes diversions. Le corps du génie a puissamment contribué à former sur divers points des collections d’antiquités, et l’un des régimens de la légion étrangère, grace au zèle et aux lumières de son colonel, M. Carbuccia est devenu un utile auxiliaire de la science, comme il a toujours été sur le champ de bataille le valeureux auxiliaire de la conquête. On peut même dire qu’il s’est établi une sorte de solidarité entre l’armée française et l’armée romaine, et la cérémonie militaire qui eut lieu Le 4 mai 1849 auprès des ruines de Lambessa en offre la preuve. Ce jour-là, la division de Batna était rangée, sous les armes, autour d’un tombeau nouvellement restauré : ce tombeau, c’était celui de Titus Flavius Maximus, chef de la légion troisième Augusta. Les restes de Flavius, conservés dans l’urne même qui les avait recueillis il y a tant de siècles, furent déposés de nouveau dans la tombe, et nos soldats saluèrent par des feux de bataillon la dépouille du général romain. Ils avaient tant de fois, sur les cimes de l’Atlas ou sur les débris épars dans la plaine, rencontré ce nom de la troisième Augusta, que cette légion, avait fini par être pour eux une troupe amie, qui avait versé son sang pour leur frayer la voie.

Les recherches récentes de l’un de nos archéologues et de nos épigraphistes les plus éminens, M. Léon Renier, chargé d’une mission scientifique en Algérie, ont ajouté d’un seul coup une masse considérables d’indications précieuses à celles que nous possédions déjà. Dans les ruines de Verecunda, de Thamugas, de Diana, de Sigus et de quelques autres localités, M. Renier a copié ou estampé lui-même 1,585 inscriptions inédites et jusqu’à ce jour inconnues, sans compter celles qui lui ont été communiqués par divers officiers, et principalement par M. le commandant de La Mare, ce qui porte à 3,085 le nombre total d’inscriptions qu’un premier voyage a révélées à M. Renier. Il n’est pas besoin de parler de l’importance historique des monumens lapidaires, chacun la connaît et l’apprécie ; mais ici cette importance est plus grande encore, parce que les inscriptions dont nous parlons se rattachent à des questions qui sont restées fort obscures, et qu’elles jettent une vive lumière sur le constitution de l’armée romaine et l’organisation civile et militaire de