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par les Persans révoltés. Un soldat de fortunes, Nadir, se fit alors le lieutenant de Châh-Thamas. Il arracha sa patrie aux mains des Afghans, et replaça la tourah sur la tête de celui à qui le diadème appartenait par droit de naissance ; mais le libérateur de la Perse n’était pas homme à se contenter long-temps du second rang. Il fut le premier à dépouiller du sceptre le souverain dont il avait servi la cause, et à le faire descendre de son trône reconquis pour s’y asseoir à sa place.

Le règne de Nadir-Châh ne fut qu’une longue série de guerres contre les Turcs, les Afghans et les Hindous. Cet homme extraordinaire, qui, de la condition la plus humble, s’étai élevé aux premiers grades de l’armée pour ne s’arrêter que sur le trône, est certainement l’une des plus grandes figures du XVIIIe siècle. Ses officiers allèrent jusqu’au Bosphore dicter la paix au sultan, après avoir reculé sur le territoire turc les frontières de la Perse. Vainqueur des Tartares et des Afghans, maître d’Hérat, du Candahar, de Caboul et de Baskg, Nadir traversa l’Indus, s’empara de Lahore ; et descendant vers la vallée du Gange, il alla soumettre Delhi, d’où il emporta d’immenses richesses, le trésor impérial et le fameux trône du sacre takht-i-taous. C’est sur ce précieux monument de sa conquête que, justement fier de ses victoires, enivré de gloire et couvert des innombrables pierreries du Grand-Mogol, il vint s’asseoir resplendissant aux yeux éblouis de ses sujets. Malheureusement tous les trésors de l’Inde, toutes les exactions que Nadir fit supporter à son peuple, et notamment au clergé, possesseur alors d’immenses richesses, ne purent satisfaire sa cupidité. Le despotisme cruel de ce prince avare lassa enfin les Persans que le double ascendant de la gloire et de la terreur avait courbés devant le trône. Nadir Châh fut assassiné par un de ses officiers, après avoir régné quinze années.

Ainsi qu’il arrive toujours à la suite d’une usurpation, après la mort de Nadir-Châh, d’autres ambitieux, — soldats, aventuriers ou rebelle, — convoitèrent la couronne. Aux brillantes conquêtes de Nadir, qui des bords du Tigre à ceux du Gange, avait déployé triomphalement l’étendard d’Ali, succéda une ère de guerres intestines qu’un chef hardi de nomades, ancien soldat du vainqueur des Afghans, forma en s’emparant du sceptre tombé à terre au milieu des combattans qui se le disputaient, sans qu’aucun fût assez fort pour le saisir. — Ce nouvel usurpateur, Kerim-Khân le Zend, fut le bienfaiteur de la Perse, où sa mémoire est encore vénérée. On l’honore sous le nom modeste de vekil ou régent, seul titre que voulut prendre Kerim-Khân, dont le courage entreprenant et l’énergie inébranlable, joints à une grande modération, avaient pourtant fait un roi. L’esprit élevé, le noble cœur du prince Zend relevèrent la nation persane abattue, firent refleurir les arts, encouragèrent les lettres, en rappelant la prospérité parmi les Persans. Voici comment s’exprime un des