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toutes les hypothèses, afin de pouvoir choisir celle qui représenterait le mieux l’ensemble du phénomène. On peut seulement reprocher aux astronomes de s’être trop tôt jetés dans les explications. Dans l’étude des étoiles filantes, il fallait commencer, par un pénible travail de détail réclamé de tout le monde, et que personne n’a voulu exécuter, afin d’arriver à quelques faits généraux. Au lieu de cette marche prudente, les astronomes ont tenté tout de suite d’assimiler les météores à des planètes tournant autour du soleil, ce qui les dispensait de préliminaires fatigans, puisqu’il suffisait d’observer trois des élémens de la route suivie par ces astéroïdes de nouvelle espèce. Il est donc certain que la connaissance des météores ignés a fait ce faux pas uniquement parce que l’astronomie se trouvait trop avancée. Les astronomes ont péché par excès de science, et, une fois lancés dans cette fausse direction, l’amour-propre les y a fait persister. Otez-leur la connaissance qu’ils ont du mécanisme planétaire, privez-les des formules que les plus grands géomètres leur ont données, qui permettent de déterminer une orbite à l’aide d’un très petit nombre d’observations, et alors ils étudieront le phénomène des étoiles filantes en lui-même et non plus à l’aide de trompeuses analogies, en hommes qui désirent accroître leurs connaissances, et non en docteurs qui veulent montrer la supériorité de leur talent. »

Avant de spéculer sur le phénomène, il fallait l’observer. Or, cette tâche, un homme s’en était spontanément chargé dans une ville de province, loin de tout encouragement et au milieu d’occupations purement commerciales et industrielles. Un attrait singulier porta de très bonne heure M. Coulvier-Gravier à considérer les étoiles filantes. À la vérité, c’était une fausse vue qui le conduisait ; il espérait trouver dans ce phénomène des relations avec les variations atmosphériques, et arriver à prédire par là ces variations mêmes. Malheureusement pour la science positive, qui ne s’occupe pas des causes finales, mais des choses en elles-mêmes, il avait négligé d’enregistrer ses observations, et, quoiqu’il eût commencé à observer bien long-temps auparavant, ce fût seulement en 1840 que, sur le conseil de M. Arago, il tint un journal où il inscrivit quotidiennement les directions des étoiles filantes. À partir de 1841, ce journal contint, outre les directions, le nombre des étoiles filantes, le commencement et la fin du temps de l’observation de chaque nuit. Pour embrasser tout le ciel, deux observateurs ayant été jugés nécessaires, M. Coulvier-Gravier s’adjoignit un des employés de sa maison, M. Chartiaux, qui, depuis, n’a cessé de lui venir en aide avec une intelligence et un zèle peu communs. Les choses restèrent en cet état jusqu’en 1845, où. M. Coulvier-Gravier fut mis en relation avec M. Saigey. Celui-ci, à la vue d’une aussi volumineuse collection, conçut qu’elle pourrait donner