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mais cette résistance honorable était inutile. Les collègues de M. Mamiani eux-mêmes, M. Sterbini entre autres, favorisaient publiquement l’agitation populaire. Enfin, un jour, on colporta une pétition qui ne recueillit en réalité qu’un très petit nombre de signatures, mais que les agitateurs prétendirent être l’expression des vœux de la garde nationale, et dans laquelle on demandait la convocation d’une constituante. Tout croulait. M. Mamiani fit un suprême et courageux effort. Il demanda à la chambre des députés d’être autorisé à expulser de Rome et des États Romains ceux des étrangers qui troublaient l’ordre public. Sa proposition fut repoussée, et le jour même, la junte exécutive ayant fait afficher sur les murs de Rome l’annonce officielle de la convocation d’une constituante, il sentit qu’il ne pouvait plus rien, et donna sa démission, ainsi que tous ses collègues. C’était le 20 décembre. Un des membres de la junte, le sénateur Zucchini, se retira en même temps que le ministère. Il fut remplacé par M. Galletti, précédemment ministre de la police, et qui, jusque dans l’exercice de fonctions aussi délicates, n’avait cessé de conserver la faveur des clubs. Un nouveau ministère fut formé, où M. Sterbini figura comme dans l’ancien, et où on vit apparaître un vieillard septuagénaire, nommé Armellini, qui devait rester au pouvoir jusqu’à la fin de la révolution.

La seule annonce de la convocation d’une constituante avait mis fin à l’existence morale du parlement. La chambre haute, depuis quelque temps déjà, avait cessé de se réunir, et on n’en parlait pas plus que si elle n’eût jamais existé ; la chambre des députés n’était désormais que le moins influent des clubs. Le 26 décembre, la junte exécutive en annonça la dissolution, et le 29 parut un décret qui convoquait pour le 5 février suivant une constituante élue au suffrage direct et universel, et chargée, disait le décret de convocation, « de prendre toutes les mesures qu’elle jugerait convenables pour donner à la chose publique un ordre régulier et stable en conformité avec les vœux et les tendances de toute la population ou de sa plus grande partie. »

L’année 1849 venait de s’ouvrir ; dès le 1er janvier, Pie IX protesta contre la réunion annoncée d’une assemblée qui mettait en doute et en délibération jusqu’à la légitimité de son pouvoir temporel. Il menaça de l’excommunication majeure tous ceux qui prendraient part, soit comme électeurs, soit comme représentans, à la composition de la nouvelle chambre, sans préjudice des peines d’un autre genre qu’ils pourraient encourir ; mais les foudres spirituelles du souverain pontife furent sans effet comme ses menaces temporelles, et la révolution passa outre. Elle était à son paroxysme. Les clubs s’étaient répandus de Rome dans les provinces ; ils étaient en rapport les uns avec les autres et avec ceux des autres états de l’Italie, de la Toscane principalement, qui marchait de plus en plus à une catastrophe. Un comité central,