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La Société industrielle de Mulhouse est arrivée, sans posséder aucune autorité officielle et presque sans ressources financières, à conquérir, par des travaux utiles et désintéressés, une influence morale qui s’étend même hors de l’Alsace. Composée d’un personnel nombreux, elle réunit en un faisceau toutes les forces vives de la cité et sait employer la bonne volonté et les connaissances particulières de chacun de ses membres au profit de l’œuvre commune. La chambre de commerce lui abandonne l’étude des questions spéciales qui sont adressées par le gouvernement, ou que soulève le jeu des divers élémens économiques. Comme la société se perpétue tandis que la chambre est appelée à se modifier périodiquement, l’unité des vues est mieux assurée. Centre d’un mouvement d’idées fort actif, cette association publie un Bulletin où presque toutes les questions industrielles de notre époque sont discutées par des hommes pratiques au point de vue des faits et de l’expérience[1]. L’esprit libéral de ce recueil qui reflète naturellement la pensée de la communauté mulhousienne ne s’est jamais démenti. La même société dirige une école de dessin industriel rendue gratuite pour les jeunes ouvriers qui la fréquentent. Parmi les questions dont elle se préoccupe, il en est deux qui ont une importance capitale pour les classes laborieuses : celle des logemens d’ouvriers et celle des accidens dans les fabriques. Les habitations des familles laborieuses ont été un moment à Mulhouse dans un état très fâcheux par suite de l’accroissement trop rapide de la population. Depuis vingt ans, la situation, sous ce rapport, s’est considérablement améliorée ; mais si les maisons basses et humides ont été abandonnées, si l’insalubrité a disparu[2], le mode adopté pour les nouvelles constructions présente des inconvéniens d’un autre ordre. On a bâti dans les divers quartiers de la ville de ces grandes maisons, de ces véritables casernes où, comme nous avons eu déjà l’occasion de le faire observer, le rapprochement excessif des ouvriers engendre de déplorables désordres. Une commission a été chargée par la Société industrielle de se mettre en rapport avec toutes les personnes qui ont construit en Alsace des habitations pour les ouvriers et de réunir des renseignemens sur

  1. Parmi les noms connus qui reviennent le plus fréquemment au bas des articles du Bulletin, on trouve ceux de MM. Émile Dollfus, A. Penot, Jean Zuber, Émile, Édouard et Joseph Kœchlin, Henri Schlumberger, Jérémie Risler, etc.
  2. L’application rigoureuse de la loi sur les habitations insalubres n’a donné lieu à Mulhouse qu’à la fermeture de seize logemens.