Page:Revue des Deux Mondes - 1852 - tome 13.djvu/596

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

jeunes pays ; aussi bien, entre eux ils s’entendent mieux que personne à conduire leurs affaires. Parmi les traités que nous indiquions naguère comme ayant été signés par le Brésil avec Montevideo, nous en avions oublié un essentiel, à ce qu’il paraît : c’est celui qui stipule pour le Brésil le remboursement des subsides qu’il fournit à l’État Oriental. C’est bien peut-être une leçon pour la France, qui a trop l’habitude, dans ses expéditions lointaines et problématiques, de se contenter souvent de la gloire qu’elle n’en retire pas.

CH. DE MAZADE.


BAS-RELIEFS GAULOIS TROUVÉS A ENTREMONT, PRÈS D’AIX, par M. Rouard[1]. — - A quelques kilomètres au nord de la ville d’Aix s’élève un vaste plateau dominé par les ruines d’une tour célèbre dans les guerres du moyen-âge, la tour d’Entremont. À côté de cette ruine féodale, qui a donné son nom à tout le canton voisin, on trouve d’autres débris, d’un caractère bien plus imposant, et sans aucun doute d’un âge bien plus reculé : ce sont les restes d’une muraille immense formée de blocs équarris et sans ciment. De grands arbres ont poussé çà et là au milieu des décombres de ce rempart cyclopéen, qui forme une vaste enceinte toute parsemée de pierres provenant évidemment de constructions aujourd’hui disparues. Parmi ces pierres, un petit nombre seulement sont taillées, et il est facile de voir qu’elles ont servi à construire les habitations d’un peuple à demi barbare. Le sol même est rempli de masses de fer oxydé, de meules à bras en lave volcanique, de haches, de pointes de flèche en silex, et de poteries grossières en argile commune, sans vernis et sans ornemens. Aucune monnaie, aucune médaille, aucune inscription, enfin aucun monument d’une date certaine n’a été trouvé au milieu de, ces ruines à l’égard desquelles la terre est muette comme l’histoire. C’est à peine si quelques archéologues leur ont donné en passant une rapide mention, mais personne jusqu’ici ne s’était occupé d’en rechercher l’origine et de la rattacher à la tradition historique. M. Rouard, le premier, les a sérieusement étudiées, et en expliquant dans le livre qui nous occupe le seul monument figuré qu’on y ait découvert, il a réussi à en déterminer nettement la provenance en même temps qu’il a fixé l’origine et la destination de ce monument lui-même.

D’après M. Rouard, les ruines du plateau d’Entremont sont celles d’un de ces oppidums ou postes fortifiés dans lesquels les populations gauloises se réfugiaient en temps de guerre. Ce premier point une fois établi, l’auteur recherche à quelle peuplade appartenait cette ville : sans aucun doute, c’était aux Salves ou Saliens, que Pline appelle les plus célèbres des Liguriens au-delà des Alpes, et qui occupaient le pays correspondant aux départemens du Var et des Bouches-du-Rhône. Cent vingt ans environ avant notre ère, les Saliens confédérés sous leur roi Teutomas prirent les armes contre les Marseillais et les Romains leurs alliés. Le proconsul Sextius Calvinus fut envoyé contre eux avec des forces considérables ; il les défit en bataille rangée, s’empara de leur principale ville, la détruisit, vendit les habitans à l’encan, et fonda sous le nom d’Aquœ Sextiœ (les eaux Sextianes) une colonie qui devint la ville d’Aix. Après avoir rapproché de ce premier fait une foule de témoignages historiques, M. Renard arrive à cette conclusion, qu’on peut regarder les ruines d’Entremont comme les derniers vestiges de la ville salienne détruite par Sextius.

Tout ce qui se rattache à la question géographique est savamment traité par

  1. Aix, 1851, in-8o.