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fication du traité conclu avec le Hanovre pour la fusion des deux systèmes, les épigrammes n’ont point été épargnées aux prétentions de l’Autriche, à ses finances, à son papier-monnaie. Le gouvernement prussien lui-même montre la ferme intention de ne point répondre à l’appel qui lui a été adressé. En général, les états qui font partie du Zollverein témoignent une certaine hésitation en présence des propositions de l’Autriche. Cette hésitation, qui montre les difficultés de l’entreprise, n’en prouve point l’impossibilité. Si l’orgueil germanique, tout en conservant quelque défiance pour la politique de l’Autriche, ressent une satisfaction intérieure quand cette puissance se présente à lui comme une conquête allemande sur des peuples barbares, l’esprit de colonisation et de commerce, si développé aujourd’hui chez les peuples d’outre-Rhin, éprouve de son côté une émotion bien concevable à la pensée du vaste champ qu’une union plus étroite de l’Allemagne avec l’Autriche ouvrirait à l’activité de la race germanique dans l’Europe orientale et jusqu’en Asie. L’économiste qui a le plus contribué à la fondation et au développement du Zollverein, Frédéric List, avait indiqué à la politique commerciale de l’Allemagne cette direction nouvelle, et il prodiguait les encouragemens à ce mouvement de colonisation qui a déjà conduit tant de populations allemandes sur les deux rives du Bas-Danube. « L’Allemagne, a-t-il dit dans son Système national d’économie politique, a un immense intérêt à voir régner dans ces régions la sûreté et l’ordre, et l’émigration qui se dirigerait de ce côté est la plus facile pour les individus comme la plus avantageuse pour la nation. Avec cinq fois moins d’argent et de temps qu’il n’en coûte pour se rendre, aux bords du lac Érié, un habitant du Haut-Danube peut se transporter dans la Moldavie et dans la Valachie, ou dans la Servie, ou encore sur la côte sud-ouest de la mer Noire. List n’a point conclu à la nécessité présente d’un Zollverein austro-allemand, parce qu’il semblait douter que jusqu’à nouvel ordre l’industrie allemande pût soutenir avantageusement la concurrence de l’industrie autrichienne ; mais ses craintes à cet égard passent pour exagérées, et lui-même a dit que le jour où le Zollverein pourrait soutenir cette concurrence, rien ne serait plus désirable pour la confédération que de voir les deux industries entrer dans la voie des concessions réciproques. C’est en faisant valoir avec habileté des argumens de cette nature essentiellement germanique, que l’Autriche combat en ce moment la Prusse sur ce terrain même de l’union douanière, où elle a été si long-temps toute-puissante. L’Autriche dût-elle échouer dans cette lutte nouvelle, on reconnaîtra qu’elle déploie de grandes ressources d’esprit et une persévérance infatigable : aucun gouvernement n’agit ou du moins ne se remue plus qu’elle aujourd’hui en Europe.

Les chambres hollandaises viennent d’entrer en vacances, après avoir terminé la discussion du budget de 1852. Cette discussion a, comme d’ordinaire, offert à toutes les nuances de l’opposition l’occasion de se montrer et de porter un jugement parfois assez sévère sur certains actes du gouvernement. Le parti des protestans zélés, représenté par M. Groen, a pressé de questions vivement formulées le ministre de l’intérieur, M. Thorbecke, au sujet de la loi sur l’instruction publique qu’il doit présenter en vertu de la loi fondamentale. Le ministre n’a pas voulu s’expliquer ni quant aux principes ni quant à l’époque de la présentation de cette loi. Le département de la justice a été, de son côté,