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des massacres de Vassy et d’Amboise, qu’on se fasse surtout cette simple question : Que nous ont donné les Guise ? La ligue. — Que nous a donné Richelieu ? Le siècle de Louis XIV. – On peut choisir.


II. – LES DERNIERS GUISE.

En 1605, la cour de France assistait paisiblement aux noces de Charles, duc de Guise, avec une princesse de Modène. « A peine quelques jours de réjouissances y avaient-ils été consacrés, que le nouvel époux se trouva impliqué dans une vive dispute de cour. Deux frères (de la maison de Bourbon), le prince de Conti et le comte de Soissons, se croisant en carrosses sur le chemin du Louvre, s’étaient querellés pour la préséance au point d’échanger un brutal et scandaleux défi. Guise chargé par la reine d’apaiser Conti, qui se montrait le plus intraitable, réussit promptement dans sa négociation. Les courtisans toutefois dénaturèrent le fait, et représentèrent les formes suivies par le prince lorrain en cette occasion comme une sorte de bravade à l’égard des princes du sang. « Deux partis se forment aussitôt, prêts à soutenir respectivement, dans une lutte imminente, le comte de Soissons et le duc de Guise, devenus adversaires. La reine impose les arrêts au dernier, contre lequel le connétable demande justice devant le conseil, et dont Sully justifie toute la conduite. Guise, sur les instances du maréchal de Bouillon et du duc d’Épernon, se montre disposé à faire transmettre des excuses au comte de Soissons. Celui-ci ne s’en contente pas toutefois ; il exige une démarche directe et personnelle. Pressé de recouvrer sa liberté, le prince lorrain est sur le point d’acquiescer à cette condition ; mais, en se rendant à l’hôtel de Soissons, il passe chez le duc de Mayenne, qui le dissuade de céder ainsi, et lui promet d’intervenir comme médiateur pour faire reconnaître son innocence, tout en ménageant la susceptibilité de leur maison. Effectivement, Mayenne prononce le lendemain, en présence de la reine, des paroles convenues d’avance : « Madame, dit-il au nom de son neveu, sur l’opinion que M. le conte de Soissons a eue que ce qui se passa mardy a donné quelque occasion de se plaindre de moy, je puis asseurer votre majesté que je n’ay eu nulle pensée ny intention de luy en donner subject, et serois très marry de l’avoir faict : au contraire, si je l’eusse rencontré, je lui eusse rendu l’honneur qui lui est deu, désirant demeurer son très humble serviteur. — Je suis bien aise de ce que vous me dites et en demeure fort contente. » répond la reine, et, après une telle déclaration personne n’ose plus se permettre de chercher à donner suite à cette fâcheuse affaire[1]. »

  1. Hiloire des Ducs de Guise, t. IV.