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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.


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14 février 1851.

M. de Falloux racontait ici même, il y a quinze jours, avec la délicatesse et la sincérité de son esprit, combien les hommes des partis monarchiques s’étaient donné de mal pour faire vivre la république, que les républicains laissaient mourir en attendant qu’ils disparussent eux-mêmes derrière les socialistes. Ces hommes, à l’en croire, et il était placé pour être bien instruit, ces hommes éminens, et la France avec eux, commencèrent pourtant à désespérer d’une tâche si ingrate, lorsqu’il fallut nommer le futur président de cette république si peu viable : on choisit le nom qui semblait le moins propre à la consolider. L’élection du 10 décembre n’aurait été de la sorte qui le contre-coup d’une expérience avortée ; on se serait rejeté sur un prince, parce qu’on ne savait plus comment nourrir ses illusions républicaines ; on aurait voté pour le prince Louis Bonaparte, « parce qu’on n’avait pas encore le courage de la monarchie, et parce qu’on n’avait plus le goût de la république. »

Nous renvoyons à M. de Falloux le mérite et la responsabilité de cette appréciation. Tout ce que nous en voulons conclure, c’est qu’en la supposant fondée, il s’est opéré chez ceux qu’elle touche plus particulièrement une révolution en vérité très considérable. Aux yeux du public, les incidens de notre récente histoire parlementaire, y compris le dernier, le vote du 10 février, ces incidens de plus en plus vifs ne peuvent avoir que deux sens : ou bien ils se rattacheraient à des griefs trop personnels, à des mobiles trop secondaires, à des rivalités trop peu patriotiques, pour qu’il n’y fallût point regarder à deux fois avant de les amputer à quelqu’un ou bien ils signifient que ce goût de la république qu’on ne se sentait plus guère au 10 décembre s’est maintenant retrouvé dans le fond de certaines consciences qui ont ordinairement le privilège de guider celle des autres. N’est-ce pas en effet de par les principes républicains, n’est-ce pas selon la rigueur des convenances républicaines que l’on s’est mis