Page:Revue des Deux Mondes - 1851 - tome 9.djvu/60

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avec lui d’inclinations et de talent, n’a cessé de lui confier la traduction de ses ouvrages. C’est à cette association que l’on doit le portrait de M. de Pastoret, celui du pape Grégoire XVI, le Mirabeau à la tribune, etc., et cette belle estampe du Strafford, l’un des produits les plus remarquables de la gravure moderne. Enfin, on sait que M. Henriquel-Dupont s’occupe aujourd’hui de terminer l’immense travail qu’il a entrepris, il y a quelques années, d’après l’œuvre la plus importante de M. Delaroche : l’Hémicycle de l’École des Beaux-Arts, gravé en trois parties, présentera une fois de plus l’alliance de deux noms que la faveur publique a depuis long-temps consacrés, et qu’un nouveau succès achèvera sans doute de populariser l’un par l’autre. La manière de M. Henriquel-Dupont ne manque assurément ni de force ni de fermeté, et, pour ne citer qu’un exemple, le portrait de M. Bertin, quoiqu’un peu chargé de ton peut-être, rappelle, quant au modelé, la manière énergique des anciens maîtres français ; néanmoins il semble que le goût et l’élégance distinguent principalement ce style et caractérisent son allure habituelle. Un sentiment de dessin plutôt coulant que fier, un sentiment de couleur et d’effet parfaitement judicieux, beaucoup d’intelligence dans le choix des travaux, telles sont les qualités dont les estampes de M. Henriquel-Dupont portent le plus ordinairement l’empreinte. Nulle part rien d’âpre ni de heurté par excès de résolution ; partout les traces d’un talent plein de sérénité et de tact, qui dispose de ses ressources, mais qui n’en abuse jamais : talent circonspect, s’il en fut, en qui l’absence d’audace n’est pourtant pas de la timidité, et l’harmonie des facultés la négation de la verve. Aux yeux de beaucoup de gens, le mérite a d’autant plus d’éclat qu’il contraste avec des défauts évidens, et l’on mesure souvent la puissance d’imagination d’un artiste à l’étendue de ses écarts. En jugeant à ce point de vue les ouvrages de M. Henriquel-Dupont, on serait probablement tenté de leur reprocher leur apparence irréprochable. Qu’on les critique ou qu’on les loue de la sorte, il n’en faudra pas moins reconnaître que le graveur a atteint le but qu’il s’était proposé. Sans doute M. Henriquel-Dupont a eu toute sa vie le besoin de satisfaire plus encore que celui de dominer : en demeurant dans les limites de ce qui peut plaire, en se montrant réservé sur l’emploi des moyens, sans négliger cependant aucune des conditions de son art, il obéit à la fois à ses instincts de modération, aux leçons de son expérience et à la belle tradition française qu’il a, plus qu’aucun autre, mission de continuer. — Parmi les graveurs de notre pays qui méritent d’être cités après lui, on ne saurait omettre M. Forster ; — M. Achille Martinet, qui a donné un digne pendant à sa Vierge au chardonneret en publiant sa Vierge aux palmiers ; — M. Prévost, auteur de plusieurs grandes planches d’après Léopold Robert