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Tout en appréciant la délicatesse du ton et du dessin, on peut regretter que tant de talent soit ainsi dépensé à préciser la guipure microscopique d’une nappe, les ornemens d’un vase émaillé, etc., et qu’il ne serve pas surtout à mettre en relief l’expression des têtes et les parties du tableau offrant le plus d’intérêt. M. Mercurj a prouvé ailleurs que l’art pour lui n’était pas la patience. Il est plus que probable qu’il ne se départira pas de sa méthode première, et la planche de Jeanne Grey qu’il termine à Rome, où il est revenu se fixer, sera plus conforme sans doute au style du graveur des Moissonneurs qu’à celui du graveur de la Sainte Amélie. — M. Calamatta, dont quelques ouvrages ont été exécutés d’après ceux de M. Ingres, pouvait, en face d’une peinture si ferme, donner carrière à ses instincts innés de dessinateur, à son goût pour la correction du contour et du modelé. Son Voeu de Louis XIII, où les formes fières et accentuées de l’original sont rendues avec une résolution qui donne à l’ensemble un aspect magistral, est, à beaucoup d’égards, une planche fort remarquable ; mais il y a, dans certaines parties, un peu de dureté d’exécution, un peu aussi de cette manœuvre recherchée dont le portrait de M. Guizot, d’après M. Delaroche, offrit ensuite des traces plus évidentes. À ces légères imperfections près, cette belle estampe est digne de la faveur qui l’a accueillie ; et il serait à désirer qu’après avoir moins réussi dans sa Françoise de Rimini, d’après M. Scheffer, le graveur s’attachât de nouveau au maître auquel il doit son plus éclatant succès. Il semble que la manière sévère de M. Ingres soit plus propre qu’une autre à inspirer M. Calamatta, et, si le Voeu de Louis XIII ne le démontrait suffisamment, on en trouverait une nouvelle preuve dans le portrait de l’illustre peintre, si habilement gravé en fac-sirnile du dessin. On pourrait souhaiter aussi que M. Calamatta, quels que fussent les modèles choisis par lui, se montrât moins avare de productions. Depuis le portrait du duc d’Orléans, publié il y a quelques années, aucune œuvre importante n’est venue témoigner des progrès de son talent. M. Calamatta dirige aujourd’hui l’école de gravure établie à Bruxelles, et les travaux des élèves n’ont pas dû jusqu’ici satisfaire si complètement le maître, qu’il puisse se contenter de ce résultat. Sans doute il y aurait avantage pour tout le monde à ce que le graveur de Louis XIII justifiât plus souvent par ses exemples l’autorité de ses enseignemens.

D’autres artistes italiens contribuent de nos jours à relever l’école de sa longue déchéance. On doit citer parmi eux : M. Jesi, auteur du portrait de Léon X d’après Raphaël ; M. Raimondi, de Milan ; MM. Perfetti et Buonajuti, qui, les premiers dans leur pays, ont gravé, avec le respect dû à de si nobles modèles, les œuvres des anciens maîtres florentins. Enfin, en mentionnant les hommes qui depuis le commencement du siècle ont participé au mouvement de l’art italien, chacun