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féconde, s’ils allaient de préférence peupler les provinces où ils retrouveraient à peu près climat de leur patrie. M. le prince de Joinville prépare en ce moment la mise en culture des vingt-cinq lieues carrées de terrain qu’il a reçues en dot, de la princesse dona Francisca dans la province de Sainte-Catherine. Nul douter que cette colonie, bien dirigée et surtout bien protégée ne devienne un jour une des plus florissantes de l’empire. Rien, au reste ; ne s’oppose à ce que ce résultat soit facilement atteint ; rien, ni les qualité personnelles du prince, ni l’intelligence des colons attachés à sa fortune, et qu’il a fait choisir avec soin dans les populations les plus civilisées, ni le climat ni le sol,.ni la province, qui est sans contredit une des plus fertiles du Brésil, et offre, en particulier, d’incontestables avantages pour la culture du blé et de la vigne.

Le gouvernement brésilien s’occupe sans relâche de ces projets de colonisation auxquels il sent que son avenir est attaché, mais force lui est de s’arrêter sans cesse devant des obstacles immenses, et souvent, au moment décisif, de ne rien conclure. En 1844, il signa un contrat avec une maison du Brésil à l’effet d’y introduire six cents colons ouvriers européens pour les travaux publics des provinces ; malheureusement jusqu’à ce jour, rien ne s’est réalisé. Plus tard, un plan de colonisation assez vaste a été proposé par un Belge nommé Van Lede. Cette entreprise était commanditée par une compagnie qui s’honorait de voir figurer, en tête de ses actionnaires, le roi Léopold, le comte de Mulenaere, et un grand nombre de notabilités politiques et financières de la Belgique. La compagnie, un peu exigeante dans ses prétentions, n’a rien pu conclure avec le gouvernement, et tout de ce côté aussi reste en projet.

Le gouvernement brésilien, il y a quelques années, avait mis les chambres en demeure de voter une loi qui lui eût assuré la faculté de concéder ou de vendre à bas prix, dans les provinces les plus fertiles du sud de l’empire, les terres incultes où des colons demanderaient à s’établir. Ce projet de loi, auquel malheureusement s’étaient mêlées des questions politiques, est resté plusieurs années à l’étude, et a seulement été adopté vers la fin de 1850. À défaut d’un système régulier et uniforme de colonisation, le gouvernement ne refuse jamais asile et secours aux étrangers qui accourent de leur propre mouvement, et demandent au pays, en échange de leur travail, un sort plus heureux que celui qui leur a fait fuir leur patrie. C’est ainsi que plus de deux mille Allemands ont fait récemment la traversée à leurs frais, pleins de confiance dans la protection du gouvernement brésilien, duquel ils sollicitent des terres à cultiver. Comme souvent, leur passage payé, les émigrans se trouvent dénués de toute ressource en touchant le sol du Brésil, on pourvoit généreusement à leur entretien et à leur installation dans la province où ils veulent se rendre.

Ce ne sont pas seulement des agriculteurs et des ouvriers que le Brésil devrait demander à l’Europe ; il y aurait aussi à provoquer l’émigration des pêcheurs européens, auxquels on confierait l’exploitation de l’immense littoral qui s’étend du cap Frio jusqu’à Espirito-Santo. Depuis long-temps, il est prouvé que les nations qui se livrent avec le plus d’activité à la pêche sont en général aussi celles qui possèdent la meilleure marine et les meilleurs marins. Eh bien ! sur la côte du Brésil, entre les deux points que nous venons de désigner, pullulent