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pour la noblesse de leurs chevaux. — Sachez que les meilleurs chevaux du Sahara sont les chevaux des Hamyan sans exception. Ils ne possèdent que d’excellens chevaux, parce qu’ils ne les emploient ni pour le labour, ni pour le bât; ils ne s’en servent que pour expéditionner et se battre. Ce sont ceux qui supportent mieux la faim, la soif et la fatigue. Après les chevaux des Hamyan viennent ceux des Harar, des Arbâa et des Oulad-Nayl.

Dans le Tell, les meilleurs chevaux pour la noblesse et pour la race, la taille et la beauté des formes, sont ceux des gens du Cheliff, principalement ceux des Oulad-Sidi-Ben-Abd-Allah (Sidi-el-Aaribi), près de la Mina, et encore ceux des Oulad-Sidi-Hassan, fraction des Oulad-Sidi-Dahhou, qui habitent la montagne de Mascara. Les plus rapides sur l’hippodrome, beaux aussi de forme, sont ceux de la tribu des Flitas, des Oulad-Cherif et des Oulad-Lekreud. Les meilleurs pour marcher sur des terrains pierreux, sans être ferrés, sont ceux de la tribu des Assassena, dans la Yakoubia. On prête cette parole à Moulaye-Ismaïl, le sultan célèbre du Maroc : « Puisse mon cheval avoir été élevé dans le Mâz, et abreuvé dans le Biaz! »

Le Mâz est un lieu du pays des Assassena, et le Biaz est le ruisseau, connu sous le nom de Foufet, qui route sur leur territoire.

Les chevaux des Oulad-Khaled sont aussi renommés pour les mêmes qualités; Sidi-Ahmed-ben-Youssef a dit au sujet de cette tribu : « Les longues tresses et les longs djelales se verront chez vous jusqu’au jour de la résurrection, » faisant ainsi l’éloge de leurs femmes et de leurs chevaux.

Vous me dites que l’on vous soutient que les chevaux de l’Algérie ne sont point des chevaux arabes, mais des chevaux berbères (barbes). — C’est une opinion qui retourne contre ses auteurs. Les Berbères sont Arabes d’origine. Un auteur célèbre a dit : « Les Berbères habitent le Mogheb; ils sont tous fils de Kaïs-Ben-Ghilan. On assure encore qu’ils sortent des deux grandes tribus hémiarites, les Senahdja et les Kettama, venus dans le pays lors de l’invasion de Ifrikech-el-Malik. » D’après ces deux opinions, les Berbères sont bien des Arabes. Les historiens établissent d’ailleurs la filiation de la plupart des tribus berbères, et leur descendance des Senahdja et des Kettama. La venue de ces tribus est antérieure à l’islamisme. Depuis l’invasion musulmane, le nombre des Arabes émigrés dans le Mogheb est incalculable. Quand les Obeïdin (les Fatémites) furent maîtres de l’Egypte, d’immenses tribus passèrent en Afrique, entre autres les Riahh. Elles se répandirent de Kaïrouan à Merrakech (Maroc). Nul doute que les chevaux arabes ne se soient répandus dans le Mogheb comme les familles arabes. Au temps de Ifrikech-ben-Kaïf, l’empire des Arabes était tout-puissant; il s’étendit dans l’ouest jusqu’aux limites du Mogheb, comme au temps de Chamar l’Hiémiarite il s’étendit dans l’est jusqu’à la Chine, ainsi que le rapporte Ben-Kouteiba dans son livre intitulé El Mârif.

Il est bien vrai que si tous les chevaux d’Algérie sont arabes de race, beaucoup sont déchus de leur noblesse, parce qu’on ne les emploie que trop souvent au labourage, au dépiquage, à porter, à traîner des fardeaux, et autres travaux semblables, parce que les jumens ont été soumises à l’âne, et que rien de cela ne se faisait chez les Arabes d’autrefois. À ce point, disent-ils, qu’il suffit au cheval de marcher sur une terre labourée pour perdre de son mérite. On raconte à ce sujet l’histoire suivante.