et de la puissance, semble le défier et le diriger : jurés, parlement, tout ce qui n’est pas corrompu par la complicité l’est par la crainte. Un verdict déclare Bothwell innocent. Enfin, le 15 mai, trois mois après la mort du roi, à quatre heures du matin, par un dernier scandale qui met le comble à celui de l’impunité, Marie épouse, au palais d’Holy-Rood, l’homme que la clameur publique, en Écosse et hors de l’Écosse, dénonçait comme le principal assassin de son mari.
Tel fut le crime. L’histoire du temps, je pourrais dire l’histoire du crime, n’en offre pas de plus odieux. La préméditation, le guet-apens; à côté de la victime que la haine immole, des meurtres commis sans colère; un page étranglé, deux serviteurs ensevelis sous les ruines de la maison, — rien n’y manque; il y a plusieurs crimes en un seul, et fût-il possible de rendre évidente l’innocence de Marie, le seul malheur d’y avoir été mêlée serait déjà une tache à sa mémoire.
Cependant M. Mignet lui impute la moitié du crime; la moitié, ce ne peut pas être assez : de Bothwell et de Marie, le plus coupable, le plus assassin, ce serait Marie.
M. Mignet donne à l’appui de son opinion trois sortes de preuves; mais je ne devrais pas me servir de ce mot-là. Il ne s’agit pas, en effet, d’une dissertation à outrance, comme celle de M. Malcolm Laing, que M. Mignet a consultée avec discrétion; il s’agit d’un récit qui expose toutes les circonstances en leur ordre et n’en aggrave aucune, qui est animé dans la forme, mais au fond calme et triste. L’historien se résigne aux preuves que lui apportent les faits et que lui impose l’histoire plutôt qu’il ne les donne en son nom ou n’y ajoute avec le contentement du dissertateur heureux de sa découverte, dût un nom historique en demeurer à jamais flétri. Quoique adoucies par le regret avec lequel il semble les donner, ces preuves n’en sont pas moins terribles. Ce sont : 1° la conduite même de Marie avant et après le meurtre; 2° les témoignages judiciaires; 3° des lettres authentiques de la main de la coupable.
Ce devrait être assez de cette dernière sorte de preuves. Des témoignages judiciaires peuvent être infirmés; la conduite de Marie peut s’interpréter de diverses façons : qu’opposer à des aveux directs? Si Marie a avoué, on n’a que faire des témoignages judiciaires, et toute sa conduite n’est plus que celle d’une femme qui fait étrangler son mari pour jouir de l’adultère avec son complice.
Mais les lettres de Marie sont-elles de sa main, ou ne s’y trouve-t-il rien qui ne soit de sa main ? Je devrais mettre la question au passe, car les originaux, purs ou falsifiés, n’existent plus; il n’en reste que